Mes mille et une nuits à lire
Blog d'un lecteur assidu
Je voulais en savoir un peu plus sur la figure de Gerda Taro, Gerta Pororylle de son vrai nom de juive allemande exilée en France, grande photographe de guerre pendant le conflit espagnol, auprès de son compagnon Robert Capa (André Friedmann). Leur courte...
"Combien en est-il là-haut qui se croient de grands rois, et se vautreront ici dans la fange, laissant après eux d'horribles mépris !" Virgile, traversant le cinquième cercle de l'Enfer de Dante. Les premières lignes du premier grand livre écrit en italien,...
Je suis friand des fictions d'apocalypse et des films catastrophe en général (je n'en manque pas un, et même les pires qui s'annoncent). J'aime voir ce qui s'y joue. Quand on parle de tragique, on parle enfin de l'essentiel. Jean-Paul Engélibert, dans...
J 'ai offert ce livre à un membre de ma famille en 1996... Et depuis je le vois de temps en temps, et je me dis que je vais le lire. Le moment en est venu. En le lisant j'ai trouvé pourquoi, mais ça je ne vous le dirai pas ! Cependant quel délice toujours...
"Halte aux promoteurs". C'est une phrase que l'on a tous entendue, depuis que les villes ont été livrées à la gentrification, puis, parfois, à des retournements de cycle qui portent l'accumulation ailleurs, car ce qui se dévalue devient attractif par...
"On le sait, il était interdit aux juifs de prédire l'avenir. La Torah et la prière leur enseignent par contre la remémoration. Pour eux la remémoration désenchantait l'avenir auquel ont succombé ceux qui cherchent instruction chez les devins. Mais pour...
« Voir » (Les enseignements d’un sorcier yaqui) est un des livres de Carlos Castaneda écrit après contact, d’après auteur et éditeur, des sorciers mexicains, d’un sorcier, un « brujo » en particulier. Castaneda était un ethnologue étasunien mais son livre...
En 1933, Georges Bataille participait à une revue d'ultra gauche, où il fréquentait notamment Simone Weil. Celle-ci se demandait à haute voix comment elle pouvait côtoyer quelqu'un d'aussi différent qu'elle. C'était un débauché, jusqu'au bout, pis que...
L'excellente " Quinzaine littéraire " m'a fait l'honneur, en lien avec la famille de Pierre Mendès France, de me confier la chronique de la réédition des mémoires de guerre de PMF, dont j'avais évoqué une ancienne édition sur ce blog, qui leur avait plu...
La tragédie affectionne la gloire et la chute, la chute parce que la gloire, la gloire et donc la chute. C'est pourquoi ceux qui l'aiment délaissent parfois Lady Mc Beth ou Médée et s'intéressent parfois aux étoiles du sport ou des arts populaires. Jérôme...
« Il faudra un jour faire une histoire du monde vue du point de vue des migraineux : hypertrophie du monde intérieur, hyper-lucidité, fulgurances, abattement, vœux d'anéantissement. » Jacques Julliard Il y a bien des manières de se confronter à l’absolu....
La philosophie a approché la danse, qui lui semble de prime abord si lointaine que ce lointain est bien entendu signe du familier. Il y a Nietzsche, pour lequel, il me semble, c’est tout à fait spécial, puisque toute son œuvre pourrait se résumer à un...
Hypathie d’Alexandrie, figure émouvante qui a traversé les âges, a été projetée aux yeux d’un grand public par le film « Agora » d’Alejandro Amenabar, qui s’est cherché un chemin entre réalité historique et surinterprétation didactique. Là où dans l’Histoire...
Le philosophe Jacques Rancière n'est pas un garçon facile. Il est un peu irritant à cet égard. On ne le comprend, je crois, que si l'on saisit qu'il a essayé de survivre à son maoïsme de jeunesse. Il le dit lui-même, dans le livre dont on va parler, il...
Le néolibéralisme ne doit pas être analysé comme une simple résurgence, après avoir été enterré comme une taupe, par le capitalisme Keynésien et fordiste, du vieux libéralisme d'Adam Smith, qui s'est heurté aux guerres mondiales, à la révolution russe...
« Le monde d’hier » constitue les mémoires de Stefan Zweig. On y sent le désespoir de Zweig, mais par pudeur – il évoque à peine en plus de cinq cents pages sa vie intime, ses femmes-, ou par optimisme de la volonté, souci de legs, auto conviction selon...
A près avoir beaucoup aimé sa biographie de Virginia Woolf, je viens de lire celle que Viviane Forrester a consacrée à Vincent Van Gogh, " Van Gogh, ou l'enterrement dans les blés". C'est encore une belle biographie, mais à lire un auteur dans son ampleur...
Je suis de ceux qui considèrent que la culture est le politique. Si l’on s’en tient à ce qu’Hannah Arendt définit comme le politique : ce qu’il y a entre les gens. Cet espace-là. Ce qu’il y a de plus politique sont les raisons d’agir et donc les représentations...
C e n'est pas un essai de plus qui entre dans la fameuse querelle de l'art contemporain. Mais un essai pour comprendre. Qu'est ce que l'art contemporain ? Nathalie Heinich a cru autrefois qu'il s'agissait d'un genre. Une catégorie de l'art moderne qui...
G ame Of Thrones me donne tellement à penser, que j'ai réouvert Norbert Elias , ce génial sociologue de la construction de l'occident qui m'avait tant plu lors de mes chères études. Dans "La société de cour" il montre ce que l'Histoire a de spécieux,...
L es aphorismes saisis ici ou là de Wittgenstein m'ont fasciné depuis un long moment, car ils me semblaient approcher cette opacité du monde, ce que Sandra Laugier appelle "l'inquiétante étrangeté de l'ordinaire", que l'on ressent inévitablement dès qu'on...
E nthousiasmé par son World War Z très récemment chroniqué dans ce blog, j'ai décide de poursuivre l'œuvre de Max Brooks consacrée au fléau zombien en lisant son " Guide de survie en territoire zombie". Bien m'en a pris. Il s'agit d'un manuel très pratique,...
Deleuze et Guattari, Gilles et Félix de leurs prénoms, sont cités, cités, cités. Particulièrement "l'anti -oedipe" et "Mille plateaux". J'avais lu Deleuze à propos de Spinoza mais je n'étais pas entré de première main dans le trio majeur "Capitalisme...
I l s'en vendrait comme des petits pains aux Etats- Unis nous dit-on. Un livre d'économie politique de près de 1000 pages truffées de statistiques. Le sujet n'est pas celui, « successfull », d'une secte gnostique délurée qui aurait détourné la Terre pour...
D ans un essai fort bien écrit, certes un peu touffu (typiquement psy....) tout juste paru mais qui fleure un peu vintage, ce qui n'a rien de péjoratif, Max Dorra appelle à en revenir à l'outil privilégié à ses débuts par le traitement psychanalytique...
Un sociologue me classerait dans la catégorie quantitative des « grands lecteurs » (ce qui ne signifie pas que je lis bien…).
D’abord, tout petit, j’ai contemplé les livres de mes parents qui se sont rencontrés en mai 68 à Toulouse. Pas mal de brûlots des éditions Maspero et autres du même acabit… Je les tripotais, saisissant sans doute qu’ils recelaient des choses considérables.
Plus tard, vint la folie des BD : de Gotlib à Marvel.
Et puis l’adolescence… pendant cette période, mes hormones me forcèrent à oublier la lecture, en dehors des magazines d’actualité, de l'Equipe et de Rock’n Folk.
Mais la critique musicale est heureusement lieu de refuge de l’exigence littéraire. Et il arrive souvent aux commentateurs sportifs de se lâcher.
De temps en temps, je feuilletais encore les ouvrages de la bibliothèque familiale A quatorze ans, je n’avais aucune culture littéraire classique, mais je savais expliquer les théories de Charles Fourier, de Proudhon, et je savais qui étaient les « Tupamaros ».
J’étais en Seconde quand le premier déclic survint : la lecture du Grand Meaulnes. Je garde le sentiment d’avoir goûté à la puissance onirique de la littérature. Et le désir d’y retoucher ne m’a jamais quitté.
Puis je fus reçu dans une hypokhâgne de province. La principale tâche était de lire, à foison. Et depuis lors, je n’ai plus vécu sans avoir un livre ouvert. Quand je finis un livre le soir, je le range, et lis une page du suivant avant de me coucher. Pour ne pas interrompre le fil de cette "vie parallèle" qui s’offre à moi.
Lire, c’est la liberté. Pas seulement celle que procure l’esprit critique nourri par la lecture, qui à tout moment peut vous délivrer d’un préjugé. Mais aussi et peut-être surtout l’impression délicieuse de se libérer d’une gangue. J’imagine que l’Opium doit procurer un ressenti du même ordre. Lire permet de converser avec les morts, avec n’importe qui, de se glisser dans toutes les peaux et d’être la petite souris qu’on rêve…
Adolescent, j’ai souvent songé que je volais, par exemple pour aller rejoindre une copine laissée au port… Et la lecture permet, quelque peu, de s’affranchir du temps, de l’espace, des échecs , des renoncements et des oublis, des frontières matérielles ou sociales, et même de la Morale.
Je n’emprunte pas. J’achète et conserve les livres, même ceux que je ne lis pas jusqu’au bout ou qui me tombent des mains. Ma bibliothèque personnelle, c’est une autre mémoire que celle stockée dans mon cerveau. Comme la mémoire intime, elle vous manque parfois, et on ne saurait alors dire un mot sur un livre qu’on passa trois semaines à parcourir. Mais on peut à tout moment rouvrir un livre, comme on peut retrouver sans coup férir un souvenir enfoui dans la trappe de l’inconscient.
Lire est à l’individu ce que la Recherche Fondamentale est au capitalisme : une dépense inutile à court terme, sans portée mesurable, mais décisive pour aller de l’avant. Lire un livre, c’est long, et c’est du temps volé à l’agenda économique et social qui structure nos vies.
Mais quand chacun de nous lit, c’est comme s’il ramenait du combustible de la mine, pour éclairer la ville. Toute la collectivité en profite, car ses citoyens en sont meilleurs, plus avisés, plus au fait de ce qui a été dit, expérimenté, par les générations humaines. Le combat pour l’émancipation a toujours eu partie liée avec les livres. Je parie qu’il en sera ainsi à l’avenir.
J’ai été saisi par l'envie de parler de ces vies parallèles. De partager quelques impressions de lecture, de suggérer des chemins parmi tant d’autres, dans les espaces inépuisables de l’écrit. Comme un simple lecteur. Mais toujours avide.
Je vous parlerai donc des livres que je lis. Parlez-moi des vôtres.
Jérôme Bonnemaison,
Toulouse.