Mes mille et une nuits à lire
Blog d'un lecteur assidu
Dans cette période troublée que nous vivons, agitée par le terrorisme, on voit poindre sans cesse le mot « nihiliste » dans les analyses foisonnantes du phénomène. C’est très discutable. Comment penser que des gens qui croient sans aucune espèce de doute,...
Avant d'être consacrée par le Goncourt, pour un livre que je n'ai pas lu, Leïla Slimani avait écrit un premier roman, "Le Jardin de l'ogre" . Un roman "choc", "sans tabou" si apprécié des éditeurs et des colonnes des journaux féminins. L'histoire d'une...
Norbert Elias avait beau être un génie sociologique, il ne prétendait pas livrer de recette du génie, ne serait-ce que parce que son apparition est historique, et que le train du génie particulier ne repasse pas, comme une histoire d'amour est une chimie...
.... Après avoir traversé des éloges du caractère vital de la lecture et une dénonciation violente de la bifurcation numérique, nous continuons notre exploration de ce qui "se lit sur la lecture", utile à pense r sa pérennité, avec deux modérés, Antoine...
"Il s'agit simplement d'être fidèle à la règle du combat. Cette pensée peut suffire à nourrir un esprit : elle a soutenu et soutient des civilisations entières. On ne nie pas la guerre. Il faut en mourir ou en vivre. Ainsi de l'absurde : il s'agit de...
-Celui qui écrit trace le plan d'un labyrinthe inédit dans un pénitencier. Un pénitencier dont on ne peut s'echapper. La langue. les tunnels se croisent sans cesse dans l'intertextualite. - Mais il y a des Mains levées à cette inca r cé r ation. La musique....
Qui a lu « Les mémoires d'Hadrien » ou l' »Oeuvre au noir » aura été inévitablement stupéfait par la radicalité idiosyncratique de ses œuvres. . En lisant ces chefs-d’œuvre nous avons l'impression de parcourir des journaux intimes de première main. Nul...
L'auteur de ce blog de lecteur, qui est aussi un cadre supérieur "dans le social et l'éducatif" pour faire vite, fait paraître un livre su r la petite enfance aux Editions Dunod, le must de l'édition sociale. Aucun rapport avec ce dont on t raite ici...
En lisant "Le pressentiment" , d' Emmanuel Bove, j'ai songé à Oblomov de Goncharov mais surtout à un cousinage de premier degré avec Irène Nemirovski et sa littérature moraliste, impitoyable, crépusculaire, et laissant filtrer en même temps un amour déçu,...
Il y a des Atlandide sous les phrases. Une phrase à destination pr écise peut mener à des champs incommensurables, et finalement il est de peu d'impor tance en littérature de savoir si l'auteur a disposé du sous-texte ou si notre imaginaire l'a déployé....
L'identitaire. Cette horreu r. En "Bloc", certes, mais surtout en cancer généralisé qui si l'on passait la France et l'Europe au Petscan, cette machine d'imagerie de la maladie, très impressionnante, éclaterait en tâches morbides dans tout le corps social....
Pourquoi une biographie de plus de Malraux ? C'est ce qu'on se demande devant la couverture de l’œuvre de Sophie Doudet. Ce n'est pas un portrait, c'est une biographie en bonne et due forme. Sans doute l'éditeur, Gallimard « Folio », une maison où le...
Quelqu’un qui écrit un avis sur un livre n’a pas à se préoccuper essentiellement de savoir s’il serait « capable de faire aussi bien ». Même s’il écrit aussi par ailleurs. Il écrit en tant que lecteur. Un livre est écrit pour être lu et finalement le...
Le Marathon des mots, manifestation littéraire de début d'été - cette semaine même-, est installé depuis, je crois, 2006, à Toulouse. Il est porté depuis le début par le "bon client" Olivier Poivre d'Arvor et une petite équipe stable, forte de ses réseaux...
Joseph Conrad est un immense écrivain, ce qui signifie qu'il va au plus simple et par ce biais évoque l'universel. La honte et l'honneur, avec "Lord Jim", la manipulation du sens de la justice, avec "l'agent secret". Et dans ce court roman dont je parle...
Ce sont les années 50 et le poète qui n'est pas encore l'immense figure qu'il sera de son vivant vient visiter la tombe de celui qui est mort durant son adolescence. Son passeur privilégié avec cette grande idée communiste à laquelle il donnera une forme...
"Le siècle des lumières" d'Alejo Carpentier est un grand roman classique de la littérature sud américaine, qui démontre que l'on a pu, au temps des avants-gardes (quand il écrit, en France on essaie le "nouveau roman"), réaliser de grandes fresques romanesques...
"L'enracinement" ,écrit dans l'exil londonien et combattant,,à la fin de la vie de Simone Weil , est un remède au prurit identitaire borné et vindicatif qui nous empuantit. L'incroyant que je suis n'a aucun mal à admirer la puissance de pensée de cette...
En refermant la longue nouvelle de Thomas Mann, "La mort à Venise" , il m'est revenu le souvenir de la scène jouée par Jean Pierre Melville, dans ".A bout de souffle" de Godard. Il joue un écrivain qui répond à un interview et avoue son plus grand fantasme...
En défendant l'idée selon laquelle c'est la honte qui constitue le motif essentiel de la littérature, Jean-Pierre Martin nous convie dans un voyage plaisant et touchant à travers les œuvres de très nombreux écrivains (Nizan, Broch, Bernhard, Kafka, Gombrowicz,...
"Le cavalier suédois" est un roman de Léo Perutz, viennois de la première partie du XXème siècle, de ce fameux "monde d'avant" qui agitait la mélancolie de Zweig. Un roman chouchouté par des lecteurs avisés, qui le gardent un peu comme un secret coquet....
Pour l'écrivain et psychanalyste Jean Bertrand Pontalis, écrire, se constituer durablement comme individu, l'un et l'autre, l'un avec l'autre, était se placer et cheminer sous l'ombre des songes, le songe des ombres. C'est ce qui ressort de ce recueil,...
Je suis né dans les années 70, je n’ai pas découvert le comique de l’absurde avec Ionesco, Beckett ou Chesterton et son « club des métiers bizarres », Jarry . Ils sont venus après, juste après les Monty Python. Mais comme beaucoup, dans ma génération,...
J'ai trop peu lu d'ethnologie et j'en ai le regret. J'y remédierai, car chaque ouvrage de cette "catégorie" que j'ai lu - il y en a dans ce blog- m'a été une grande respiration, une invitation à se défaire des pesanteurs de la pensée enkystée, une incitation...
Ce blog existe depuis cinq ans, et c'est la première fois que je vais parler d'un livre de quelqu'un que je connais personnellement. Ce n'est pas un ami, ni même un copain, c'est une vieille connaissance. Je l'aime bien en fait, mais c'est à peu près...
Un sociologue me classerait dans la catégorie quantitative des « grands lecteurs » (ce qui ne signifie pas que je lis bien…).
D’abord, tout petit, j’ai contemplé les livres de mes parents qui se sont rencontrés en mai 68 à Toulouse. Pas mal de brûlots des éditions Maspero et autres du même acabit… Je les tripotais, saisissant sans doute qu’ils recelaient des choses considérables.
Plus tard, vint la folie des BD : de Gotlib à Marvel.
Et puis l’adolescence… pendant cette période, mes hormones me forcèrent à oublier la lecture, en dehors des magazines d’actualité, de l'Equipe et de Rock’n Folk.
Mais la critique musicale est heureusement lieu de refuge de l’exigence littéraire. Et il arrive souvent aux commentateurs sportifs de se lâcher.
De temps en temps, je feuilletais encore les ouvrages de la bibliothèque familiale A quatorze ans, je n’avais aucune culture littéraire classique, mais je savais expliquer les théories de Charles Fourier, de Proudhon, et je savais qui étaient les « Tupamaros ».
J’étais en Seconde quand le premier déclic survint : la lecture du Grand Meaulnes. Je garde le sentiment d’avoir goûté à la puissance onirique de la littérature. Et le désir d’y retoucher ne m’a jamais quitté.
Puis je fus reçu dans une hypokhâgne de province. La principale tâche était de lire, à foison. Et depuis lors, je n’ai plus vécu sans avoir un livre ouvert. Quand je finis un livre le soir, je le range, et lis une page du suivant avant de me coucher. Pour ne pas interrompre le fil de cette "vie parallèle" qui s’offre à moi.
Lire, c’est la liberté. Pas seulement celle que procure l’esprit critique nourri par la lecture, qui à tout moment peut vous délivrer d’un préjugé. Mais aussi et peut-être surtout l’impression délicieuse de se libérer d’une gangue. J’imagine que l’Opium doit procurer un ressenti du même ordre. Lire permet de converser avec les morts, avec n’importe qui, de se glisser dans toutes les peaux et d’être la petite souris qu’on rêve…
Adolescent, j’ai souvent songé que je volais, par exemple pour aller rejoindre une copine laissée au port… Et la lecture permet, quelque peu, de s’affranchir du temps, de l’espace, des échecs , des renoncements et des oublis, des frontières matérielles ou sociales, et même de la Morale.
Je n’emprunte pas. J’achète et conserve les livres, même ceux que je ne lis pas jusqu’au bout ou qui me tombent des mains. Ma bibliothèque personnelle, c’est une autre mémoire que celle stockée dans mon cerveau. Comme la mémoire intime, elle vous manque parfois, et on ne saurait alors dire un mot sur un livre qu’on passa trois semaines à parcourir. Mais on peut à tout moment rouvrir un livre, comme on peut retrouver sans coup férir un souvenir enfoui dans la trappe de l’inconscient.
Lire est à l’individu ce que la Recherche Fondamentale est au capitalisme : une dépense inutile à court terme, sans portée mesurable, mais décisive pour aller de l’avant. Lire un livre, c’est long, et c’est du temps volé à l’agenda économique et social qui structure nos vies.
Mais quand chacun de nous lit, c’est comme s’il ramenait du combustible de la mine, pour éclairer la ville. Toute la collectivité en profite, car ses citoyens en sont meilleurs, plus avisés, plus au fait de ce qui a été dit, expérimenté, par les générations humaines. Le combat pour l’émancipation a toujours eu partie liée avec les livres. Je parie qu’il en sera ainsi à l’avenir.
J’ai été saisi par l'envie de parler de ces vies parallèles. De partager quelques impressions de lecture, de suggérer des chemins parmi tant d’autres, dans les espaces inépuisables de l’écrit. Comme un simple lecteur. Mais toujours avide.
Je vous parlerai donc des livres que je lis. Parlez-moi des vôtres.
Jérôme Bonnemaison,
Toulouse.