Mes mille et une nuits à lire
Blog d'un lecteur assidu
Ce livre rédigé dans les années 70 est un brillant plaidoyer, certes parfois foutraque, car on aimait bien à cette époque pousser les feux par principe... pour une pensée qui ne considèrerait pas la science comme une nouvelle théologie. Paul Feyerabend...
C'est le roman d'un style : le flux. "L'apocalypse des travailleurs" de Valter Hugo Mae, quadra portuguais débarquant en traduction en France, est avant tout cela : l'utilisation d'un style particulier. Qui a du sens pour narrer l'histoire dont il s'agit....
J 'ai passé mes vacances dans une région relativement désertique. Qui dit désert dit politique. Non pas parce que nous désertons la politique et qu'elle est un désert mais parce qu'elle est ce qui peuple le désert, ou si l'on préfère, ce qui permet de...
Jean François Bayard est un essayiste prolifique, passionnant, qui développe une pensée sur la littérature, mais forcément, comme la littérature est le monde -et on le verra tous les mondes - sur la vie. Son précédent essai (évoqué dans ce blog), "aurais...
L a matrice de toutes les histoires reste pour nous, occidentaux, l'Illiade homérique. Mais l'australien David Malouf choisit pour sa part, avec son roman "La rançon" , d'y faire son nid. Il revient longuement, d'un style prodige, fidèle aux sensations...
J e connaissais Clara Zetkin, notamment parce que je me suis beaucoup intéressé à la figure unique de Rosa Luxembourg, dont elle était l'amie la plus proche (Rosa lui a bien rendu en ayant une liaison secrète avec son fils... Ah l'amour, l'amour, l'amour...)....
L a collection "raconter la vie", au Seuil, est née je crois me souvenir, d'une idée de Pierre Rosanvallon suite à son grand essai sur la communauté des égaux. Il s'agissait de donner une visibilité à la France invisible. Celle que la littérature oublie,...
O n doit remercier Ernest Renan, qui a écrit une "vie de jésus", livre surprenant (que j'ai lu il y a quinze ans) et sans lequel Emmanuel Carrère n'aurait peut-être pas eu l'idée d'écrire ce magnifique projet littéraire et spirituel : "le Royaume". Renan...
" Au delà du principe de plaisir" de Sigmund Freud est tout sauf un livre de sagesse qui nous demanderait de nous hisser au delà du désir et de ses impasses. Pas le genre de la maison. Tout le propos du freudisme échappe à cette logique de la sagesse,...
I l est toujours très frappant de constater le décalage temporel entre le monde des idées et celui de la politique (au sens de sphère politique spécialisée). Alors que dans le premier on en est depuis quelques années à discuter de la société d'après le...
Eric Chauvier est un intempestif. Cet anthropologue, qui s'était illustré il y a un ou deux ans (voir dans ce blog) par une défense des périurbains (subsumés par la critique de la périurbanité), dans un essai abruptement titré "contre telerama", élargit...
J 'éprouve comme beaucoup une certaine fascination triste pour les faits divers, inutiles, poisseux aussi, et tellement intriguants. Ils m'écoeurent mais j'ai toujours le sentiment qu'ils disent quelque chose d'essentiel. Leur caractère exceptionnel n'est...
L es éditions "les prairies ordinaires" ont rassemblé des textes commentés par des chercheurs français, dressant le panorama mondial d'une géographie critique radicale de la ville contemporaine, soit de la ville capitaliste, puisque c'est le mécanisme...
"Toute licence en art"... Cette expression provient d'un dialogue fameux entre les exilés André Breton et Léon Trotsky qui s'essayèrent à écrire un manifeste pour la culture. Contre toute attente, c'est l'ancien dadaïste Breton qui proposa un "sauf si"...
"Je ne suis personne d'important ni ne suis spécialement brillante" Lettre ouverte au premier Ministre Rajoy, en tant que porte parole de la plate forme des victimes des hypothèques, Ada Colau "Articuler des demandes dans lesquelles 90 % de la population...
Je lis beaucoup d'essais, moins de romans, peut-être pour un temps. Pour des raisons qui renvoient à cette note de blog, simplement. Le pire étant annoncé, on peut être tenté de chercher s'il est nécessaire de s'y résoudre, et comment (on peut se résoudre...
C ’est le livre dont on parle, « Confiteor » de Jaume Cabre , monument de 800 pages, d’une densité rare. Un grand roman. Un très grand. Mais je me demandais ce qui manque à ce roman catalan pour entrer dans l’Olympe. J’y reviendrai peut-être. Difficile...
E n plus de rétablir la mémoire d'une infamie oubliée, Silvia Federici enrichit la compréhension de notre Histoire, et de la violence intrinsèque à notre monde moderne, avec "Caliban et la sorcière (femmes , corps et accumulation primitive )", un bel...
En général , pour écrire dans ce blog de lectures, je lis, je souligne parfois. Et je me lance. En me disant "c'est un blog, il va ou il veut". Mais là j'ai hésité à écrire, tellement ce second roman abordé de Michel Tournier (son premier, à 42 ans),...
E n refermant le livre ici évoqué, j’ai pensé à « Démineurs », le film passionnant de Kathrin Bigelow sur le corps de déminage envoyé en Irak pendant la deuxième guerre du golfe. L’as du déminage, un fondu qui prend tous les risques, a fini son service...
D ès l’entame de la « Promenade au phare » de Virginia Woolf on crie au génie. Un génie qui s’exprime aux antipodes d’autres génies littéraires. Woolf c’est le contraire absolu du minimalisme littéraire, celui de Dashiell Hammett (« Moisson rouge« ) qui...
J e ne me suis pas dérobé, et pourtant je pense que la pudeur est un talisman. En tout cas une certaine forme de pudeur, celle qui a trait à l'essentiel. La pudeur est tellement précieuse qu'elle mérite parfois un déploiement d'impudeurs multiples et...
La regrettée Viviane Forrester nous a offert il y a de cela quelques années une magnifique biographie de Virginia Woolf. A vrai dire une des plus belles biographies que j’ai eu l’occasion de lire, moi qui en suis friand. Influencée indéniablement par...
S on admiration totale allait à Baudelaire, et c’est bien une « curiosité esthétique » que Huysmans propose avec « A rebours », sorte de comète dans la littérature française. Ecrit en 1884, ce roman étrange, qui décrit les affres dépressives d’un aristocrate...
J'ai évidemment lu sur Sade , fréquemment, mais j'ai différé de le lire dans le texte. Même l'admiration béate des surréalistes à son égard ne m'avait pas convaincu d'ouvrir ses pages. Je ne sais pas trop d'où vint cette réticence persistante au demeurant....
Un sociologue me classerait dans la catégorie quantitative des « grands lecteurs » (ce qui ne signifie pas que je lis bien…).
D’abord, tout petit, j’ai contemplé les livres de mes parents qui se sont rencontrés en mai 68 à Toulouse. Pas mal de brûlots des éditions Maspero et autres du même acabit… Je les tripotais, saisissant sans doute qu’ils recelaient des choses considérables.
Plus tard, vint la folie des BD : de Gotlib à Marvel.
Et puis l’adolescence… pendant cette période, mes hormones me forcèrent à oublier la lecture, en dehors des magazines d’actualité, de l'Equipe et de Rock’n Folk.
Mais la critique musicale est heureusement lieu de refuge de l’exigence littéraire. Et il arrive souvent aux commentateurs sportifs de se lâcher.
De temps en temps, je feuilletais encore les ouvrages de la bibliothèque familiale A quatorze ans, je n’avais aucune culture littéraire classique, mais je savais expliquer les théories de Charles Fourier, de Proudhon, et je savais qui étaient les « Tupamaros ».
J’étais en Seconde quand le premier déclic survint : la lecture du Grand Meaulnes. Je garde le sentiment d’avoir goûté à la puissance onirique de la littérature. Et le désir d’y retoucher ne m’a jamais quitté.
Puis je fus reçu dans une hypokhâgne de province. La principale tâche était de lire, à foison. Et depuis lors, je n’ai plus vécu sans avoir un livre ouvert. Quand je finis un livre le soir, je le range, et lis une page du suivant avant de me coucher. Pour ne pas interrompre le fil de cette "vie parallèle" qui s’offre à moi.
Lire, c’est la liberté. Pas seulement celle que procure l’esprit critique nourri par la lecture, qui à tout moment peut vous délivrer d’un préjugé. Mais aussi et peut-être surtout l’impression délicieuse de se libérer d’une gangue. J’imagine que l’Opium doit procurer un ressenti du même ordre. Lire permet de converser avec les morts, avec n’importe qui, de se glisser dans toutes les peaux et d’être la petite souris qu’on rêve…
Adolescent, j’ai souvent songé que je volais, par exemple pour aller rejoindre une copine laissée au port… Et la lecture permet, quelque peu, de s’affranchir du temps, de l’espace, des échecs , des renoncements et des oublis, des frontières matérielles ou sociales, et même de la Morale.
Je n’emprunte pas. J’achète et conserve les livres, même ceux que je ne lis pas jusqu’au bout ou qui me tombent des mains. Ma bibliothèque personnelle, c’est une autre mémoire que celle stockée dans mon cerveau. Comme la mémoire intime, elle vous manque parfois, et on ne saurait alors dire un mot sur un livre qu’on passa trois semaines à parcourir. Mais on peut à tout moment rouvrir un livre, comme on peut retrouver sans coup férir un souvenir enfoui dans la trappe de l’inconscient.
Lire est à l’individu ce que la Recherche Fondamentale est au capitalisme : une dépense inutile à court terme, sans portée mesurable, mais décisive pour aller de l’avant. Lire un livre, c’est long, et c’est du temps volé à l’agenda économique et social qui structure nos vies.
Mais quand chacun de nous lit, c’est comme s’il ramenait du combustible de la mine, pour éclairer la ville. Toute la collectivité en profite, car ses citoyens en sont meilleurs, plus avisés, plus au fait de ce qui a été dit, expérimenté, par les générations humaines. Le combat pour l’émancipation a toujours eu partie liée avec les livres. Je parie qu’il en sera ainsi à l’avenir.
J’ai été saisi par l'envie de parler de ces vies parallèles. De partager quelques impressions de lecture, de suggérer des chemins parmi tant d’autres, dans les espaces inépuisables de l’écrit. Comme un simple lecteur. Mais toujours avide.
Je vous parlerai donc des livres que je lis. Parlez-moi des vôtres.
Jérôme Bonnemaison,
Toulouse.