Barbara Cassin, est une païenne, "barbare" donc, choisissant une statue de femme hittite comme pommeau de son épée laser non léthale d'académicienne…. Elle s'emploie notamment à réhabiliter la Grèce perdue qui n'a pas fomenté le christianisme, celle d'avant Platon (qu'on connait cependant par lui), soit… Les sophistes. Et c'est ce que dit d'abord et avant tout ce titre d'essai : "Quand dire c'est vraiment faire (Homère. Gorgias, et la nation arc-en ciel)"
En effet, la philosophe va aller loger dans la stratégie politique de sortie de l'apartheid les grandes vertus politiques de la sophistique ! En les sortant de la prison où la tradition platonicienne, qui parle à leur place, les a condamnées. Platon a réussi à accrocher le péjoratif au mot même de sophiste. Parce qu'ils sont relativistes, qu'ils ne croient pas à des essences, comme Platon, ils seraient de vils tricheurs, des fripouilles. Que nenni si l'on suit Barbara Cassin. Et l'exemple de leur postérité, dans l'exploit que commet Nelson Mandela en sortant l'Afrique du Sud de l'Apartheid sans massacre de masse, le prouve très directement, en mettant en exergue la force politique d'une parole spécifiquement politique et non infatuée par le culte de "la "Vérité.
C'est un essai dédié au langage performatif. Parler, c'est parler de , parler à, mais pour les sophistes il y a cette troisième possibilité du langage : agir. "Faire des choses avec des mots". Yes we can, et je t'aime, c'est parler pour agir. Les sophistes croyaient à la toute puissance du langage.
Barbara Cassin se réfère à Austin, et distingue deux performatifs; l'un qui en disant, le plus fort, l'autre qui agir par le fait de dire. Le premier elle en prend exemple chez Homère, quand Ulysse dit à Nausicaa : "je te prends les genoux" et non pas simplement "je me mets à genoux devant toi". Homère, c'est déjà la sophistique, c'est la poésie, Platon s'y oppose. Les sophistes, par la puissance du langage, "déféchitisent" la vérité et la fausseté. Ils "font primer la félicité sur la vérité". Ils sont relativistes. C'est le bonheur qui doit gagner.
Pour éviter la terreur, Mandela et les siens ont inventé cette commission qui entend la parole, et propose l'amnistie. Sur la base de l'exhaustivité de la parole.
"Ceux qui ne sont pas encore vaincus demandent l’amnistie. Ceux qui ne sont pas encore vainqueurs ne peuvent pas ne pas l’accorder. C’est là le deal". Le moment était donc favorable, encore une notion grecque, celle du Kairos. L'ANC a donc décidé une troisième voie entre celle de la justice d'après victoire, sanglante, et celle de l'amnistie générale, à la libanaise, qui a pourri la vie du Liban depuis… Comme un refoulement.