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le blog d'un lecteur toulousain assidu

"Michael Jackson", regard glauque sur la jeunesse

 

 

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Encensé par la critique branchouille, voici un roman du dit "prometteur" Pierric Bailly, intitulé "Michael Jackson"(P.O.L), alors qu'il n' y est nullement sujet du roi de la pop.

 

Michael Jackson n'est cité que pour le symbole qu'offre sa mort. La fin d'une période. La fin de la jeunesse. Celle des deux personnages principaux du roman, Luc et Maud. Trois jeunesses vécues dans des mondes parallèles, à 18, 22, 26 ans. Toujours à Montpellier. Des personnages falôts qu'on va suivre pas à pas dans les rues de cette ville, accompagner dans leurs loisirs, leur intimité. Le roman est conçu comme un espèce de journal de de Luc, dont on partage les sentiments, les impressions souvent brutes, et les doutes.

 

Encensé par la critique... Mouais...

 

La jeunesse s'étire, comme celle de MJ et de Peter Pan. Elle est devenue un long tunnel. Elle est sans balises et incertaine. Soit.

 

Mais la jeunesse, si l'on suit Bailly, c'est le nihilisme. Le néant meublé par l'omniprésence de l'alcool et de l'érotisme. Mais un érotisme glauque et déjà fatigué. Un érotisme qui se noie d'emblée dans un porno sordide et cheap. Une jeunesse peuplée de monades, agglutinées à quatre ou cinq dans de petits apparts en ville. Ne se disant pas grand chose. N'ambitionnant pas grand chose. Collés à leurs nombrils. Des jeunes qui s'emmerdent à la fac, qui n'en tirent rien. Pour qui le politique (ne parlons même pas de l'engagement) est comme Pluton sur une carte de la Galaxie. Des jeunes qui ont de quoi se payer à boire, mais on ne sait même pas comment.

 

Ce fut peut-être la jeunesse de Pierric Bailly, mais pas la mienne, tout juste quelques années auparavant. Et pas celle que je connais.

 

Pour moi et tant d'autres, la jeunesse fut certes longue, l'entrée dans l'âge adulte progressive et incertaine. Parfois douloureuse et angoissante tant il est difficile de casser le plafond de verre qui enferme cette jeunesse. Et c'est vrai que les années avançant, on a l'impression de glisser dans un entonnoir, de s'enfoncer dans l'irréversible.

 

Mais ces années universitaires furent illuminées. Elles m'ont élevé. Elles m'ont passionné. Et même si le système ne  m'attirait que des sarcasmes et des critiques, j'en ai tiré tout le profit que je pouvais pour m'affirmer en tant qu'individu. Je ne me souviens pas d'une communauté de monades autistes, mais au contraire d'un temps où l'on est ensemble pour grandir. De solidarité, de fraternité et de rire. De vitalité aussi : quelle richesse !  Moi, j'ai profité de tout ce temps pour expérimenter, pour m'enivrer de choses et d'autres, pour me gorger d'apprentissages, pour penser, pour militer surtout. Et je me souviens que le soir où j'ai fêté mon diplôme, j'avais conscience qu'une page se tournait. Jusque là, je m'étais occupé de moi. J'en avais profité. Même avec pas grand chose sur son compte en banque, c'est une chance magnifique de ne se préoccuper que de soi. On ne la revoit pas passer.

 

"Michael Jackson" de l'étoile montante Pierric Bailly, c'est Bret Easton Ellis sans l'humour, sans le vertige métaphysique. Il n'en reste que les péripéties sans intérêt. De la complaisance pour  l'ivrognerie et le cradingue. La relève présumée de notre littérature qui se vautre dans les travers connus d'une partie de notre cinéma hexagonal.

 

Sans doute aurais-je du plutôt lire une biographie de Michael Jackson, tant qu'à y être. Lui au moins c'était un dieu du funk. Et il nous a fait vibrer. Pour moi, c'était dès mes dix ans.

 

Alors pourquoi les critiques encensent -ils un roman comme celui-ci ?

 

Peut-être parce qu'il est de bon ton de salir notre jeunesse, dans ce pays, même quand on a des idées "avancées". Et l'on est d'autant plus crédible pour le faire qu'on vient de sortir de la jeunesse, qu'on porte une casquette comme Pierric Bailly. La jeunesse n'est jamais à sa place. Elle est "moins bien" qu'en 68, qu'en 86, qu'en 95, que pendant le CPE. Elle est à plaindre ou elle est décevante. Elle est qualifiée de "ridicule" quand elle participe aux nanifestations contre la casse des retraites. Tout ça doit légitimer qu'on la traite comme une loque. Ce qui est son cas... dans le logement, l'emploi, les budgets, les équipements de nos villes, les Partis politiques.

 

Et personne ne s'offusque quand une Ministre de l'Enseignement Supérieur annonce qu'elle va instaurer... une autorisation administrative préalable aux soirées étudiantes et y interdire la distribution gratuite d'alcool !!! Pourquoi pas un Décret sur l'interdiction des mini shorts dans ces soirées, tant qu'on y est ? La jeunesse, turbulente, sert toujours de galop d'essai pour tester la résistance du corps social à des intrusions de plus en plus osées dans nos vies privées, de la part d'un Etat qui cherche à faire oublier son impuissance économique en investissant le bio politique.

 

Pierric Bailly est bien sûr très loin de tout cela. Mais son regard glauque sur la jeunesse est symptomatique de ce que l'on veut imprimer sur cette génération.

 

Pour ma part, je suis un ancien jeune. Un ancien étudiant. J'en éprouve de la nostalgie. Et tout cela n'avait rien de crapoteux. 

 

Bon, sur le coup, je me suis bien fait berner par la critique...

 

 

 

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G
<br /> Entièrement d'accord j'ai trouvé ce roman illisible, pesant, affligeant de banalité, j'ai eu un mal fou à le lire entièrement....une punition! Rigoureusement aucun intérêt d'étaler ainsi sa propre<br /> nullité!<br /> <br /> <br />
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J
<br /> <br /> oui.Moi aussi j'ai eu du mal à finir. Mais bon depuis que je fais ce blog je me force parfois pour pouvoir y compris écrire des posts un peu critiques.<br /> <br /> <br /> Après, l'énigme, c'est pourquoi une telle médiocrité est encensée, distinguée dans la montagne des sorties ? Le titre raccoleur l'explique un peu sans doute. Mais j'ai voulu essayer de<br /> comprendre ce qui plaisait tant dans ce genre de publications. Et je pense que c'est "une complaisance pour le cradingue" alliée à une haine recuite de la jeunesse, y compris dans le<br /> "jeunisme" lui-même.<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> <br />
D
<br /> Bonjour Jérôme,<br /> je n'ai pas lu ce bouquin, mais j'ai lu ta critique, qui est passionnante comme d'habitude.<br /> Cordialement.<br /> F.M<br /> <br /> <br />
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J
<br /> <br /> Celui-là de livre, je te le recommande pas vraiment... Décevant malgré les critiques emphatiques.<br /> <br /> <br /> J'en profite pour te dire que quand tu reprends mes posts, j'ai une hausse parfois brutale de mes consultations. Presque 200 pour "peux t-on être de gauche et se comporter comme une brute...". Je<br /> ne sais pas comment tu fais, mais c'est drôlement efficace. Ne te gêne surtout pas ! Sinon, t'inquiètes pas, je vais aussi sur les blogs des collègues. Par contre j'ai du mal à faire des<br /> commentaires. Je sais pas pourquoi. Faut que j'y pense.<br /> <br /> <br /> <br />