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2 septembre 2019 1 02 /09 /septembre /2019 00:25
Tout commence maintenant à la fin - Fabuler la fin du monde (la puissance critique des fictions d'apocalypse)-Jean-Paul Engélibert

Je suis friand des fictions d'apocalypse et des films catastrophe en général (je n'en manque pas un, et même les pires qui s'annoncent). J'aime voir ce qui s'y joue. Quand on parle de tragique, on parle enfin de l'essentiel. Jean-Paul Engélibert, dans son essai, "Fabuler la fin du monde", veut démontrer en quoi ces fictions sont de vrais vecteurs de critique politique. A sa place, j'aurais utilisé d'autres sources que les siennes (pas un mot sur "Walking Dead", ce qui me paraît vraiment dommage au vu de la richesse à en tirer). Il y a aussi des films apocalyptiques conservateurs, qui nous expliquent en somme que si nous écoutons bien ce qu'on nous dit, nous nous en tirerons, ou bien que de toute manière le système tremble mais il est bien fait, et on s'en sort tout de même à la fin, et le Président prononce un discours sur les ruines pour dire que l'on va rebâtir. Bref on a tourné en rond. Mais ce ne sont pas ces fictions qui intéressent l'auteur.

 

Nous sommes donc dans l'anthropocène, et il commence à devenir perceptible avec Hiroshima selon l'auteur. La bombe rend l'apocalypse perceptible, au bout du bouton rouge. D'où la multiplication des œuvres littéraires ou filmées sur la fin du monde.  Les meilleures de ces fictions "projettent dans le futur une pensée du présent". Leur qualité précisément est de nous extirper du présentisme, cet enfer permanent, qui nous enlise depuis que l'idée du progrès est rentrée en crise. C'est l'intérêt de la fiction apocalyptique, qu'elle se situe juste avant la fin, ou juste après, elle nous débarrasse du présentisme. Nous sommes conduits à un nouveau regard sur les différentes temporalités. Le Royaume est "déjà là" disait Jésus, et l'idée chrétienne d'Apocalypse, de "révélation", doit conduire le croyant à vivre en sachant que la révélation arrive. C'est donc le présent qui est concerné. Le présent revisité.

 

La fiction apocalyptique existe en réalité depuis longtemps, depuis le début de la révolution industrielle. Des auteurs, déjà, parlent de l'anthropocène, et de leurs craintes à ce sujet, tels Buffon, ou Fourier (qui évoque même le climat). Revenir à ces auteurs c'est voir qu'ils ne mettent pas en cause l'"humain", ce qui est une manière un peu commode de penser l'anthropocène, mais le système techno économique occidental, et ceux qui le commandent. 

En 1805 Jean Baptiste cousin de Grainville écrit le dernier homme, qui passe inaperçu, et sera retrouvé plus tard et influencera des écrivains comme Marie Shelley. Il décrit un monde où les terres deviennent stériles, et où l'on essaie de détourner les océans vers les terres pour les raviver. Ce qui déstabilise tout.  De Grainville vise l'idéologie du progrès. Sous le second Empire un roman, "Ignis",  imagine que l'on part en Irlande creuser un trou pour utiliser le feu sous la terre… Mais que ce feu s'emballe, alors on est obligé d'aller chercher la banquise pour le calmer… Tout se passe mal.

 

Aujourd'hui les fictions apocalyptiques peuvent se passer d'évoquer ce qui a provoqué la fin du monde. Il ne manque pas de raisons. On passe, donc, sur cette étape. Comme dans "La route" de Cormac Mac Carthy (à mon sens un des chefs d'œuvres majeurs de ce début de siècle). D'autres romans, comme ceux d'Antoine Volodine ou de Céline Minard (je n'ai pas lu) en font de même. La fiction apocalyptique, aujourd'hui, aime aborder la fin… Comme un début. Il n'y a ni fin de l'Histoire ni fin tout court. Le livre commence avec la fin. Et alors ce qui se dessine est la création d'un autre monde. 

 

La force de ces fictions c'est qu'elles ne consolent pas. Elles sont radicales. Elles reposent sur l'absence d'espérance. Elles ne nous vendent pas de faux espoirs, ou de raisons d'échapper au tragique. Sans cette radicalité, elles ne nous extirperaient pas du présentisme. C'est précisément parce que dans ces fictions le présentisme n'est plus possible qu'elles déplacent le regard et constituent des perspectives critiques acides. Elles nous renvoient à la seule possibilité de l'action issue du désespoir. Aucun refuge possible dans l'espérance que Godot arrive pour nous tirer de là. Car il faut bien mesurer que nous vivons dans un discours officiel de l'apocalypse, celui des sommets sur le climat, qui parle de la calamité "qui vient si on ne fait rien", mais elle est toujours repoussée au lendemain. La fiction apocalyptique rompt avec cette manière de nous endormir. L'apocalypse, dans ces fictions, est déjà là. Elle est acquise.  Et évidemment, ça secoue… 

L'auteur a cette belle formule pour opposer les deux manières de voir. Pour le politique, l'apocalypse est imminente (remettez vous à nous pour l'éviter), pour la littérature elle est immanente. 

On a pu reprocher à Pasolini son pessimisme absolu, et Georges Didi-Huberman lui a rétorqué que "les lucioles" n'étaient pas mortes. Qu'il fallait les chercher. Mais la radicalité des prophéties apocalyptiques est de prétendre qu'aucune solution n'est possible dans le cadre du monde qui est là, c'est ainsi qu'elles transportent le regard vers un monde où l'apocalypse a déjà eu lieu. La fin a déjà eu lieu parce qu'elle est déjà là quand le prophète la pense.

 

Comme Melancholia de Lars Von Triers, ou 4: 44 d'Abel Ferrara (que j'ai vus), certaines œuvres s'installent dans le temps du délai. Entre l'annonce de la fin et la fin, inévitable. Dans ces fictions, le sens de la vie est radicalement changé. Rien n'a plus le même sens. Par exemple dans le film de Ferrara, me souviens-je, le personnage principal insulte son propriétaire qui le harcelait avec les loyers, parce qu'il n'y a plus rien à perdre. Mais certains, comme un livreur de nourriture chinoise, préfèrent continuer comme si rien ne venait et continuent à travailler. Ils nous ressemblent. Or, "c’est lorsque toutes les affaires du monde sont réduites à néant que le regard est libéré." C'est à cette libération que les auteurs nous convient, incontestablement. Une libération pour ici et maintenant.

Que se passe t-il dans ces moments ? Rien n'a plus de sens. Le temps change de signification, c'est le Kairos, le moment, et non plus le temps qui s'étale, imperturbablement, Chronos. La seule préoccupation devient ainsi l'amour. Les films de Von Trier et Ferrara finissent de la même manière. Dans le premier Dunst et Gainsbourg, avec l'enfant, se rassemblent dans une cabane fragile, pour vivre les derniers moments. Tout tient dans cette cabane, le cadre de vie bourgeois dans lequel les personnages évoluaient n'a aucune importance (et devrait n'avoir aucune importance peut-on entendre).  Dans le second, le couple se blottit, et se rassure, "nous sommes déjà des anges" dit la fille. Dans cette affirmation on peut sans doute entendre que l'on pourrait le considérer dès à présent.

 

Dans ces fictions réside l'idée d'Arendt selon laquelle toute naissance est un recommencement possible. Dans "la Route", tout est là. L'enfant est le seul innocent.

"Le père ne voit que son intérêt et celui de son fils. Il a chassé autrui de ses préoccupations. En se souciant des autres, quel que soit le mal dont ils ont pu se rendre coupables, le garçon relie les individus séparés par l’effondrement de la société. Il fabrique tout le commun possible dans un tel contexte et convainc son père de revenir sur leurs pas pour rendre au voleur les vêtements qu’ils lui ont pris. Il s’agit bien là d’action : l’enfant rétablit un monde à la petite échelle de cette humanité réduite à trois personnes."
 
Dans le monde de la valeur d'échange qui court à l'apocalypse, il y a de l'"inestimable", l'amour, ou les "lucioles" que Pasolini voit disparaître d'Italie en quelques années. On peut aussi appeler cela le sacré. Ce sacré que les néolibéraux piétinent quand ils disent "pas de tabou !" pour justifier leurs "réformes. Les fictions apocalyptiques nous rabattent vers cet inestimable.
 
Une autre thématique de la fiction apocalyptique est de restaurer l'utopie. Comme dans "Malevil" (que je n'ai pas lu) de Robert Merle (dont je ne saurais par contre trop conseiller "la mort est mon métier", coup de poing dans le foie). "Malevil" consacre l'essentiel de la narration à la construction d'une société des survivants. Ainsi, la table rase permet, à travers les tourments et discussions des personnages, de reconsidérer l'essentiel : le débat entre Hobbes et Rousseau, la question de la propriété et de l'amour libre ou non, le rôle social de la religion. Mais si ces fictions montrent des moments de bonheur, advenu grâce à l'apocalypse, et au travail acharné des survivants, elles disent aussi, contrairement à ce que l'on reproche à l'utopie, que tout s'écoule, que la politique ne cesse jamais. 
D'autres visions apocalyptiques, comme la série "Leftovers" (j'ai vu la première saison), nous disent que peut-être l'apocalypse est déjà passé par là.  Cette série commence sur le constat de la disparition de 2 % de l'humanité, sans raison, en un instant. Elle commence en réalité trois ans plus tard. On a pu la voir comme une vision de l'Amérique post crise financière. La catastrophe a eu lieu, et on la commémore, mais rien n'a changé. Une partie des habitants créent une secte qui ne cesse, elle, de rappeler l'absence de ceux qui sont partis, et prétend que l'on ne peut plus vivre sans prendre en compte cette disparition. Mais pourquoi sont-ils aussi dérangeants pour le spectateur ? Parce qu'ils pensent que l'apocalypse est derrière alors qu'il est toujours là. Ceux qui le comprennent sont ceux qui se battent pour le présent, en se rappelant du passé, et en envisageant  l'avenir. 

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"Car il ne s’agit pas de regarder ses morts pour se persuader que le monde est condamné ou que sa fin est imminente. Il s’agit bien plus d’apprendre à porter attention au présent, c’est-à-dire aux survivants. Il s’agit de regarder non pas l’image des disparus, mais la perte des disparus sur le visage de ceux qui restent."
 

Bien évidemment, la fiction apocalyptique contemporaine se saisit pleinement de la question écologique. C'est le cas avec Margaret Atwood qui imagine un monde qui " inaugure un rapport nouveau entre les humains et les autres animaux, fait d’entente et d’estime mutuelle. Le pacte scelle un accord qui interdit la prédation ou la privation des ressources de l’autre et qui engage à s’entraider en cas de danger. En d’autres termes, c’est un traité de paix et d’alliance. La promesse des Jardiniers – cultiver la Terre et la partager équitablement avec les autres espèces – prend corps. Le soin de la Terre s’articule au souci de considérer ses autres habitants comme des sujets."

 
Ces fictions ne délivrent pas de grandes leçons miraculeuses. Elles ne nous disent pas quoi faire, ni maintenant, ni en cas de survie. Mais comme souvent, la plus politique des œuvres est celle qui justement n'est pas explicitement politique. Ce n'est pas le sermon qui est politique, c'est le déplacement que l'art peut susciter en chacun de nous, en nous transportant dans l'expérience d'autrui. Ce que disent deux auteurs comme Adorno et Rancière. Et j'en suis convaincu. Le jazz est plus politique que n'importe quel film "engagé" trop explicite, qui ne remuerait rien en vous que des opinions.

 

 

 

 

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26 avril 2014 6 26 /04 /avril /2014 13:57

Enthousiasmé par son World War Z très récemment chroniqué dans ce blog, j'ai décide de poursuivre l'œuvre de Max Brooks consacrée au fléau zombien en lisant son "Guide de survie en territoire zombie". Bien m'en a pris.

 

Il s'agit d'un manuel très pratique, abordant sur un ton pragmatique, utilitariste, tout ce qu'on doit savoir pour saisir une chance de s'en tirer face à une épidémie zombique. Les différents niveaux de crise (1, 2, 3) sont abordés, et nous disposons là d'une mine de conseils pratiques absolument indispensables. Ils pourront d'ailleurs être utiles dans d'autres types de situation posant un risque vital : mais nous avions vraiment besoin de ce guide spécifique, l'apparition de zombies dans notre environnement ayant certes des points communs avec la grippe espagnole, mais soulevant nombre d'autres enjeux, dont le combat pour la survie avec des créatures hideuses, stupides et brutales, animées par l'unique préoccupation de nous dévorer et disposant d'une endurance sans limite (jusqu'à décomposition de leur corps, qui met à peu près cinq ans tout de même).

 

A vrai dire, l'auteur postule que la survie est le seul but possible. Il ne nous propose pas une réflexion plus fondamentale sur le sens qu'on peut y donner. Or quand on voit ce qu'il est nécessaire de traverser, on peut se demander si cela vaut le coup... C'est un manuel à usage individuel, le collectif n'étant abordé que de manière utlitariste, à travers l'union des forces. A un moment, l'auteur nous dit que certes on peut aider quelqu'un en difficulté, pourquoi pas, mais franchement il ne s'attarde pas. Le ton de réalisme absolu est de mise face à l'ampleur de la menace. Un semblant de morale prévaut tout de même : il s'agit bien de sauver l'espèce en se sauvant soi-même, et on ne nous conseille pas de voler ou de manger nos semblables, mais au contraire de nous méfier des bandits qui profiteront du chaos général.

 

C'est un livre très drôle, si on aime l'humour noir, car en vérité ceux qui commettent des impairs finissent souvent en steaks hachés. En réalité le livre nous livre une image de nous-même comme nous sommes aujourd'hui : dépendants, émollients, pas débrouillards pour un sou, emprisonnés dans des environnements qui exposés à une menace perdent toute valeur. Drôle est aussi le ton très scabreux et cette idée, progressant à travers le livre, selon laquelle pour survivre il faudrait en gros préparer le combat des années à l'avance et ne se préoccuper que de cela (préparant des parcours, des plans B, la constitution de stocks, d'une équipe, la planification d'un entraînement régulier...). L'ampleur de notre vulnérabilité face à une menace globale déclenche le rire... Jaune.

 

Le Guide intègre sur un mode sarcastique (j'aime beaucoup les petits dessins type notice) toute celle production culturelle de la catastrophe, qui caractérise notre époque de peur de l'avenir, d'effondrement du concept de progrès. On songe au sublime "La Route" de Cormac Mac Carthy. Si cette culture du désastre a un temps cherché la menace ailleurs : la météorite, l'alien, elle se recentre sur terre. Elle comprend désormais que la menace est endogène. Tel Godzilla ou The Host. Les morts vivants sont une menace on ne peut plus endogène, puisque nous sommes eux, ils se nourrissent de nous, et nous devenons eux.

 

Les zombies sont des créatures univoques, brutales, gémissantes et crétines (ce qui participe grandement du comique du livre), fonctionnant à l'instinct de dévoration sans limites, sans aucun égard pour leurs semblables qu'ils ne voient même pas. A qui vous font ils penser ? A l'homme consumériste sans doute ? Quelqu'un qui fonce tout droit à sa perte et à la nôtre et qu'on ne peut pas raisonner. Irrécupérable.

 

Le Zombie c'est nous, notre versant terrifiant. Il se gave de chair un point c'est tout. Nous secrétons le zombie. Il est moche, cruel, unidimensionnel comme le disait Marcuse. Le monde fabrique ses propres fossoyeurs. A vrai dire, certaines périodes de l'histoire approchent la grande catatrophe zombie. Ce qui s'est déroulé au Rwanda y ressemble.

 

Max Brooks, je crois, a eu un succès de lecture dans les cercles alternatifs. Et pour cause. Il nous décrit un avenir promis au désastre, dont la seule certitude est que nous aurons à lutter pour difficilement survivre. On ne peut rien y changer, on doit juste s'y préparer. L'élimination des zombies, en cas de survie de l'espèce au premier choc, met ensuite des décennies. Et le monde doit être rebâti. Brooks recense de nombreuses épidémies locales dans le passé qu'il nous relate avec un grand sens romanesque et réaliste. On les tait systématiquement, à chaque fois. On trouve là l'allégorie de pouvoirs qui s'aveuglent et nous préservent de vérités pour gagner du temps. Brooks en appelle ainsi à s'informer soi même et à ne plus croire à la parole officielle.

 

Un guide bien de son temps, donc. Qui régalera les grands pessimistes grinçants.

 

 

 

 

 

 

La survie mode d'emploi (Guide de survie en territoire zombie, Max Brooks)
La survie mode d'emploi (Guide de survie en territoire zombie, Max Brooks)
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6 avril 2014 7 06 /04 /avril /2014 23:17

 

La science fiction est un genre puissamment politique. Nous en avons la confirmation avec "World War Z" de Max Brooks (le fils de Mel.. Ambiance au repas de famille...).

 

Elle joue le rôle du laboratoire manquant dans les sciences sociales. En soumettant les hommes, et les sociétés à des torsions gigantesques, elle essaie de manifester de manière spectaculaire des effets de vérité.

 

En trouvant la solution pour insérer son histoire dans le futur immédiat, Max Brooks parvient à tout déstabiliser en parvenant cependant à interroger les sociétés contemporaines. L'effet de réalisme est ainsi sidérant. Nous vivons la stupeur des humains qui peuplent le livre. Il s'agit de nous.

 

Dans ce roman, l'humanité est exposée, sans s'y attendre, à un péril vital extrêmement violent. A une pandémie débordante. Mais cette épidémie est toute particulière... Elle est inextinguible si nous ne trouvons pas une solution, elle crée un ennemi à combattre, un ennemi acharné qui ne connait aucune limite ni la peur, ni la douleur. Et qui ne peut être tué que d'une seule façon, en détruisant son cerveau. Un ennemi qui n'a aucun besoin sinon celui de nous dévorer et de nous transformer en l'un de ses semblables immédiatement disponible pour continuer la destruction. Cet adversaire redoutable, imprévu, bouleversant tous les schémas de la guerre, c'est le zombie. La goule. Le Mort vivant. Surnommé Zack ou bien "G". Il est terrifiant évidemment, hideux, et il est une part de nous-même, incompréhensible, obscure.

 

Le livre est un rapport de l'ONU recueillant des témoigagnes alors que l'humanité a finalement gagné la guerre même s'il reste quelques millions de zombies sur terre, mais contenus et éliminés progressivement, chassés des zones de densité démographique humaine.

 

Le rapporteur va donc visiter le monde entier, pour interroger les survivants d'un monde détruit, qui renait doucement et où les rapports de forces ont été déplacés par le conflit. Soldats et vétérans, pères de famille, prêtre, profiteurs de guerre, survivants isolés, évoquent le présent mais aussi toutes les phases de la guerre, des prémisses de l'épidémie à la phase de grande panique planétaire, suivies du rétablissement d'un équilibre dans le conflit qui tournait à l'avantage des zombies. Puis la reconquête est amorcée et vient à bout du fléau. Mais les dégâts psychologiques, sociaux, sont incommensurables, même si on peut aussi trouver du positif dans le leg de la guerre.

 

Ce voyage mondial dans l'horreur et la résistance est une grande réflexion sur le fonctionnement des sociétés et les ressorts psychologiques individuels et collectifs. Face aux périls les sociétés ont tendance à retrouver leurs spécificités, leurs vieux repères. La Russie ne réagit pas comme les Etats Unis ni comme la Corée du Nord (la situation locale la plus stupéfiante du livre).

 

Très vite, les pays sont débordés par cet ennemi qui pullule en leur sein, ne s'arrêtant jamais d'attaquer. C'est la débandade. Le forces armées essaient de réagir avec leurs méthodes habituelles, dont on constate vite l'inadaptation. Tout est à revoir, dans l'urgence et le risque de désorganisation complète à court terme. La panique est inévitable, et parmi les fuyards les contaminés (mordus) sont légion.

 

Mais si les humains ont bien des désavantages sur les zombies dans la lutte, dont la peur, la fatigue, la vulnérabilité, la nécessité du ravitaillement, ils disposent de la raison, alors que les goules ne fonctionnent qu'à l'instinct de dévoration. C'est cet élément clé qui sera décisif.

 

La raison va permettre l'adaptation, et le partage des expériences en particulier. Elle permet de s'améliorer en fonction de l'expérience. Un mouvement effectué au prix de choix dramatiques qui pose la question éthique de manière cruciale, car le repli stratégique suppose d'abandonner des centaines de millions d'humains aux zombies, pour avoir une chance de sauver l'espèce.

 

Une fois le repli effectué, ce qui supposait déjà de reprendre pied pour faire prévaloir l'esprit d'anticipation et le discernement, l'humanité va entamer une transformation indispensable pour survivre et contre attaquer. Tout devra être révisé. D'abord dans l'improvisation puis de manière coordonnée politiquement. Dans le malheur incommensurable, une petite chance sera saisie : les zombies gèlent l'hiver, ce qui donne un semblant de répit aux humains qui se déplacent du coup vers le nord.

 

Max Brooks parvient à écrire un livre frappant, de par son réalisme, la précision des éléments pratiques fournis par les témoins, la diversité des points de vue dans le conflit, présentés habilement sous la forme de témoignages oraux recensés, donc très vivants. On a l'impression de lire de véritables chroniques de guerre, très crédibles, angoissantes. Au fait... La France s'en tire très mal...

 

Nos modèles de civilisation sont contingents, effroyablement fragiles. Nous aurions tort de les penser éternels, de les fétichiser. Une épidémie peut les abattre au prix d'une hécatombe. En lisant World War Z on pense inévitablement aussi, devant ces flots de réfugiés, cette inadaptation technologique, cette impossibilité d'échapper à la menace, au réchauffement de la planète.

 

Nous devons aussi prendre conscience de notre dépendance, dans cette immense division du travail qui est la nôtre, et du fait de notre aliénation face aux technologies. Dans World War Z, on survit parfois aux zombies mais pas à la nécessité de la survie dans la nature.

 

Faudra t-il attendre le début de la catastrophe pour essayer d'organiser la survie ? Devra t-on nous aussi sacrifier une partie immense de l'humanité plutot que d'anticiper et de modifier dès à présent nos modes de développement ?

 

On pourrait aussi voir ces zombies comme une forme d'auto destruction de l'humanité, car n'oublions pas que le zombie est produit par l'humain au contact d'un virus (dont on ne sait rien d'ailleurs). Une métaphore violente de la pandémie dépressive qui frappe notre époque par exemple. Max Brooks nous parle t-il de notre zombification culturelle et morale ? Et des changements qu'elle requiert si nous voulons continuer l'aventure humaine ? C'est une lecture possible.

 

Ce n'est pas un hasard : un des témoignages est fourni par un astronaute qui a vécu tout le conflit depuis la station spatiale. De quoi donner un cadre imagé à l'idée d'une Terre Patrie qui est notre bien commun, et ou nous devons prendre soin les uns des autres au risque de tous sombrer.

Le péril global, sérum de vérité ("World War Z", Max Brooks)
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16 novembre 2013 6 16 /11 /novembre /2013 11:12

tumblr_mkjcfctSAz1r03m0qo3_500.jpg Qu'est ce que la réalité ? C'est quand on se cogne disait Lacan. Et Philip K Dick ne cesse d'y cogner ses personnages et de nous les montrer dans leur embarras, toujours au bord du gouffre. Seulement ils ne savent pas s'ils délirent ou sont dans une autre réalité. Combien y a t-il de réalités d'ailleurs ? La physique qantique ne le sait pas, elles peuvent être infinies en nombre. Elles le sont de toute manière, puisqu'à tout moment le chaos peut rebondir, dans un monde héraclitéen où tout coule. Cent mille vies sont devant nous et peut-être derrière. Sans doute l'avant et l'après ne sont qu'une catégorie humaine, le temps étant une ligne d'instants.

 

 

La lecture de K Dick vous garantit toujours le vertige métaphysique. Si le meilleur livre que j'ai lu de cet ours paranoïaque est incontestablement "Ubik", je ne suis jamais déçu, et c'est encore le cas avec "Coulez mes larmes dit le policier". Un roman écrit sous Nixon, à une époque où les tendances vivement paranos de l'auteur se confirmaient dans l'actualité, ce qui n'était pas pour l'inciter à la nuance (pour ceux qui voudraient mieux le connaitre, Emmanuel Carrère a écrit une superbe biographie ici chroniquée : Philip K Dick est vivant et vous êtes morts ! (Emmanuel Carrère)       .

 

 

La conscience de soi rend inévitable le problème du doute sur la réalité. Et donc de doute sur autrui, toujours menaçant. Il y a, disait Pessoa, comme un "verre dépoli" entre nous et le ou les réels. Et nous ne l'effacerons jamais. L'autre, comme tout, n'est pas digne de confiance, malgré lui. Car il peut lui aussi être un mirage à ses dépends. Il est lui aussi sous emprise totalitaire.

 

 

K Dick s'inscrit à la fois dans la lignée orwelienne des uchronies et autres dystopies anti totalitaires mais il est autrement radical. Son autre source d'inspiration est plus rimbaldienne. Cette conviction selon laquelle les opiums permettent d'entrevoir d'autres réalités. Voire la vraie réalité. Plusieurs cohabitent chez K Dick. Ce n'est pas que la vraie vie est ailleurs, mais que plein de vies sont ailleurs. L'écriture de ce livre est un écho aux expérimentations dickiennes de la mescaline, qui joue un rôle important dans l'intrigue.

 

 

Dans "coulez mes larmes..." une drogue permet de déstabiliser le rapport à l'espace temps et ainsi de vivre d'autres réalités. Le souci est que dans la réalité il y a autrui, donc à travers notre perception autrui lui aussi est affecté même s'il n'a rien absorbé pour sa part. Autre souci : quand on passe de la nuit au jour on a une transition, un crépuscule ou une aube. Ces phénomènes de passage, de mutation progressive, passionnent K Dick. Car dans cette crise, ce passage, surgissent évidemment les monstres dont parlait Gramsci.

 

 

Dans le livre, un présentateur et chanteur vedette, qui a bénéficié d'un traitement génétique très rare (6 personnes sont concernées) lui conférant force et intelligence, se retrouve tout à coup un pouilleux sans la moindre identité, qui échappe ainsi au fichage généralisé et à l'espionnite aigue d'un Etat Policier futuriste (K Dick a prophétisé Snowden il y a quarante ans).

 

Jason Taverner n'existe plus, donc. Il va s'efforcer d'exister à nouveau et de comprendre ce qui lui arrive, alors que comme toujours chez notre auteur de SF, le réel n'est que précaire.  La métaphysique converge avec le politique pour insécuriser encore plus l'homme aliéné. Tout complotent, tous complotent. Donc personne en particulier finalement, ni rien.

 

L'Etat policier ultra répressif qui règne est une oligarchie mondiale nihiliste, libérale, qui ressemble de près à la russie de Poutine, où personne ne croit plus à rien, surtout pas les dirigeants qui luttent entre eux au sein des sphères de pouvoir et utilisent les citoyens complètement froids (à part les étudiants, en référence à la situation des années 60. Ils sont effroyablement réprimés, dans l'indifférence) comme des pions dans leurs luttes impitoyables. Taverner, par son anonymat incompréhensible à la Police, devient évidemment un enjeu dans cet univers totalitaire. De plus, il est issu d'une micro élite génétique, menace potentielle pour les tenants de l'ordre techno policier. L'être intelligent est une menace, et on entrevoit la mégalomanie de Dick qui se pensait traqué par un peu tout le monde.

 

Chacun est coincé dans cet étau métaphysique et politique, et donc devient un fauve et un menteur dangereux. Chaque livre de K Dick est marqué par une présence du mal. Le mal est toujours présent, il est inéluctable. On ne peut pas rester tranquille. La plupart des gens vont chercher à anticiper l'incertitude en prenant l'avantage et en passant à l'attaque. Il y a aussi de l'empathie, du désir, de la solidarité, mais jamais trop. On ne doit pas compter trop dessus. C'est un éventuel bonus.

 

 

La technologie de contrôle sur les humains est tellement développée qu'il n'est même plus nécessaire de chercher à se défendre. Jason Taverner se convainc assez rapidement de n'échapper à rien, de ne pas fuir vraiment, juste un peu. Il sait qu'on ne peut pas faire grand chose au fond, même s'il essaie de réagir au mieux face aux situations. Il s'interroge et attend de voir. Mais l'impuissance prévaut, le Léviathan est trop puissant et l'incertitude est totale. Le personnage avance comme il peut. Nous savons que l'Etat mais aussi des puissances privées peuvent savoir tout sur nous, influer sur nous à distance (y compris nous tuer à n'importe quel moment), mais que faire ? Soit partir dans le désert (qui n'existe plus), soit vivre avec comme on le peut. Pourquoi pas aussi déborder le système de l'intérieur en jouant de la force du nombre, comme le peuple Egyptien l'a fait ? Cette dernière option ne vient pas à l'esprit du pessimiste K Dick pour lequel l'individu est toujours écrasé.

 

C'est tout le problème de la paranoïa. Elle est sans limites, mais elle est réservée aux rationnels et aux lucides aussi. Ce qui explique que le paranoïaque ne puisse s'en sortir. K Dick entrevoit un univers social qui ressemble à bien des égard aux nôtres, il se pose des questions que la science soulève. Le fou n'est pas si dingue.

 

La Science Fiction d'autrefois est toujours plaisante dans la mesure ou elle voit parfois juste et évidemment se plante parfois en grand. Ainsi nos voitures volent, mais nous n'avons pas trouvé le compact disc...

 

Pour vivre un peu, il faut nécessairement adhérer au réel, lâcher prise un tant soit peu. K Dick n'arrivera jamais vraiment à vivre. Ce qui l'explique aussi, c'est l'absence de l'affect dans son oeuvre, le refoulement des émotions, hors l'angoisse. La raison raisonnante ne saurait suffire à nous apporter quelque vérité sur autrui ou le monde. Les personnages de K Dick utilisent leur pouvoir logique, toujours confronté à l'absurde, comme un serpent qui se mord la queue. L'issue, évidemment, ne peut pas être purement intellectuelle.

 

 

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20 janvier 2011 4 20 /01 /janvier /2011 08:53

foundation-asimov-swirl-cover.jpg L'autre jour, un ami qui a récemment retouvé ses racines rurales m'a donné, sur un malentendu, l'idée d'écrire un Post sur Isaac Asimov. Bonne idée, que j'exécute.

 

La Science fiction est considérée, qu'on le veuille ou non, comme un genre mineur, une littérature de petits maniaques gorgés de sébum. Il est vrai qu'ils en sont l'avant garde. On les aperçoit dans les boutiques spécialisées, le dos voûté, le caleçon années 80 dépassant du Jean, en train de compulser lentement, enfermés dans une bulle, des éditions inconnues de nous, écluseurs de Folios.

 

Mais comme le Polar (dont elle n'est souvent qu'une variante) et encore plus sans doute, la SF est sans doute mésestimée. La lecture de "Fondation" d'Asimov, grand classique du genre, vous en convaincra définitivement.

 

"Fondation" court sur 6 tomes qu'il vaut mieux lire dans l'ordre, chacun étant bien fourni. Mais vites lus, tant ils sont passionnants et limpides.

 

Très loin dans le futur, alors que l'humanité a essaimé dans l'espace, et que la Terre n'est plus qu'un mythe presque oublié, un Empire Galactique s'effondre. Un petit groupe de "psycho-historiens" est parvenu à calculer le temps que durera le chaos qui va s'ensuivre. Mais si le désastre est inéluctable, le retour de la civilisation peut être accéléré, dans l'hypothèse où certaines décisions sont prises, au cours de la période qui s'ouvre. Ces "psycho-historiens" vont constituer une Fondation capable de conserver les acquis de cette science et de défendre le "Plan" qui doit permettre à l'ordre universel de renaître le plus vite possible. Mais attention, les prévisions ont une marge d'erreur. Et le "Plan " peut dévier. De plus, si la psycho-histoire peut prédire l'avenir des grandes masses, relativement statiques, elle ne peut pas prédire l'avenir à un niveau individuel. Or, l'individu compte dans l'Histoire.

 

"Fondation" va donc nous raconter le déroulement de cette période de chaos et d'incertitudes, que les "Fondateurs" voudraient conduire sur les bons rails. Avec de nombreuses péripéties.

 

Le style n'est pas la préoccupation première de l'auteur. Il est simple, direct, efficace. Et finalement, ce n'est pas si aisé d'écrire clairement. Mal écrire, c'est peut-être s'empêtrer dans trop de guirlandes. Asimov, lui, il va au fait. Les descriptions sont sommaires, plantent le décor, et le livre utilise beaucoup les dialogues, ce qu'il y a de plus facile à lire.

 

La science-fiction tient lieu de laboratoire. Comme l'Utopie d'ailleurs, qui est sa cousine. Ce fameux laboratoire qui manque tant aux sciences humaines, pour pouvoir se hisser au niveau des sciences dites dures.

 

Ainsi, dans "Fondation", on s'interroge avec légèreté et humour -sans conséquences dans ce monde imaginaire-sur des sujets comme celui de la capacité de l'historien à anticiper l'avenir. On y compare, preuves à l'appui, les différents modèles de société : de l'individualisme absolu (des êtres enfermés dans un bunker ne se voyant jamais) au collectivisme extrême (une société totalement intégrée, fusionnant avec son environnement pour constituer un seul organisme vivant). On y réfléchit sur la statistique, sur la Logique, sur les différentes conceptions du Temps, sur la réalité du pouvoir, sur le rôle de la mémoire et des mythes dans l'Histoire, sur le rôle des anticipations formulées par les individus dans les sociétés (ce qui préoccupait beaucoup Keynes et aujourd'hui tous les économistes).

 

" Fondation", mine de rien, est un périple de pensée. Avec visite de la Galaxie en bonus. Le tout emballé dans une succession d'intrigues haletantes, que le lecteur se complaît à essayer de résoudre, sans  y parvenir par lui-même (enfin, moi...), comme dans les bons polars . Excellente évasion dans "l'infini et au delà !" (citation de Buzz l'Eclair dans Toy Story).

 


 


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Lectures de Jérôme Bonnemaison

 

Un sociologue me classerait dans la catégorie quantitative des « grands lecteurs » (ce qui ne signifie pas que je lis bien…).


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D’abord, tout petit, j’ai contemplé les livres de mes parents qui se sont rencontrés en mai 68 à Toulouse. Pas mal de brûlots des éditions Maspero et autres du même acabit… Je les tripotais, saisissant sans doute qu’ils recelaient des choses considérables.

 

Plus tard, vint la folie des BD : de Gotlib à Marvel.


Et puis l’adolescence… pendant cette période, mes hormones me forcèrent à oublier la lecture, en dehors des magazines d’actualité, de l'Equipe et de Rock’n Folk. Mais la critique musicale est heureusement lieu de refuge de l’exigence littéraire. Et il arrive souvent aux commentateurs sportifs de se lâcher.


 

De temps en temps, je feuilletais encore les ouvrages de la  bibliothèque familiale A quatorze ans, je n’avais aucune culture littéraire classique, mais je savais expliquer les théories de Charles Fourier, de Proudhon, et je savais qui étaient les « Tupamaros ».


 

J’étais en Seconde quand le premier déclic survint : la lecture du Grand Meaulnes. Je garde  le sentiment d’avoir goûté à la puissance onirique de la littérature. Et le désir d’y retoucher ne m’a jamais quitté.


 

Puis je fus reçu dans une hypokhâgne de province. La principale tâche était de lire, à foison. Et depuis lors, je n’ai plus vécu sans avoir un livre ouvert. Quand je finis un livre le soir, je le range, et lis une page du suivant avant de me coucher. Pour ne pas interrompre le fil de cette "vie parallèle" qui s’offre à moi.

 

 

Lire, c’est la liberté. Pas seulement celle que procure l’esprit critique nourri par la lecture, qui à tout moment peut vous délivrer d’un préjugé. Mais aussi et peut-être surtout l’impression délicieuse de se libérer d’une gangue. J’imagine que l’Opium doit procurer un ressenti du même ordre. Lire permet de converser avec les morts, avec n’importe qui, de se glisser dans toutes les peaux et d’être la petite souris qu’on rêve…


 

Adolescent, j’ai souvent songé que je volais, par exemple pour aller rejoindre une copine laissée au port… Et la lecture permet, quelque peu, de s’affranchir du temps, de l’espace, des échecs , des renoncements et des oublis, des frontières matérielles ou sociales, et même de la Morale.

 

 

Je n’emprunte pas. J’achète et conserve les livres, même ceux que je ne lis pas jusqu’au bout ou qui me tombent des mains. Ma bibliothèque personnelle, c’est une autre mémoire que celle stockée dans mon cerveau. Comme la mémoire intime, elle vous manque parfois, et on ne saurait alors dire un mot sur un livre qu’on passa trois semaines à parcourir. Mais on peut à tout moment rouvrir un livre, comme on peut retrouver sans coup férir un souvenir enfoui dans la trappe de l’inconscient.


 

Lire est à l’individu ce que la Recherche Fondamentale est au capitalisme : une dépense inutile à court terme, sans portée mesurable, mais décisive pour aller de l’avant. Lire un livre, c’est long, et c’est du temps volé à l’agenda économique et social qui structure nos vies.  


 

Mais quand chacun de nous lit, c’est comme s’il ramenait du combustible de la mine, pour éclairer la ville. Toute la collectivité en profite, car ses citoyens en sont meilleurs, plus avisés, plus au fait de ce qui a été dit, expérimenté, par les générations humaines. Le combat pour l’émancipation a toujours eu partie liée avec les livres. Je parie qu’il en sera ainsi à l’avenir.


 

J’ai été saisi par l'envie de parler de ces vies parallèles. De partager quelques impressions de lecture, de suggérer des chemins parmi tant d’autres, dans les espaces inépuisables de l’écrit. Comme un simple lecteur. Mais toujours avide.


 

Je vous parlerai donc des livres que je lis. Parlez-moi des vôtres.

 

 

Jérôme Bonnemaison,

Toulouse.

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