Mes mille et une nuits à lire
Blog d'un lecteur assidu
D i-thy-ram-bique ! Dans ce blog, j'essaie de contenir mes enthousiasmes, sous peine de crier risiblement au génie sans cesse. Mais pour une fois je me permettrai d'être dithyrambique. Car je viens enfin de lire "Lord Jim" de Joseph Conrad. Un livre époustouflant....
D ans un récent billet sur JP Manchette, j'ai rapidement indiqué ma fascination pour l'oeuvre cinématographique de Jean-Pierre Melville. Cette référence m'a donné envie d'y aller (re)voir de plus près : j'ai ainsi revisionné deux de ses derniers films,...
N ous avons pris le pli de nous permettre, une fois de temps en temps dans ce Blog, une petite pause poétique (Petit entracte poétique avec Char et Rimbaud) . Il faut bien que je finisse mes livres pour en parler, et certains sont plus denses et développés...
J e sors de la lecture enchantée de la vaste réflexion de Pierre Bourdieu autour de l'oeuvre de Manet. Le peintre qui marque la rupture de l'histoire de l'art basculant dans l'art moderne. Son peintre préféré, auquel, il ne le dit pas, il s'identifie...
Antonio Munoz Molina a commis, avec son "Tout ce qu'on croyait solide", un pamphlet superbe, où son style efficace, son sens de l'anecdote et de la description sont placés au service d'une charge courageuse contre son propre pays qui est plongé dans une...
Je voudrais pas crever Avant d'avoir connu Les chiens noirs du Mexique Qui dorment sans rêver Les singes à cul nu Dévoreurs de tropiques Les araignées d'argent Au nid truffé de bulles Je voudrais pas crever Sans savoir si la lune Sous son faux air de...
H annah Arendt, qu'on croise souvent dans ce blog, et Gershom Scholem, cabbaliste et grande figure intellectuelle juive, se sont connus en Allemagne avant la deuxième guerre mondiale. Ils ont cheminé ensemble, divergé, et ont correspondu longtemps. Leur...
"Je gis ma vie"... Phrase récurrente du " Livre de l'intranquillité " de Fernando Pessoa qui en dit long sur la marée de désespoir qui coule de ce livre, à côté duquel le Journal de Kafka est une gentille bluette. Le grand nom de la modernité littéraire...
" De toute façon les images peuvent maintenant renverser les rôles face à la réalité : elles la changent en ombre. Et dans la mesure où elles représentent une ressource illimitée, que ne saurait épuiser tout le gâchis de la consommation, il est d'autant...
" Pour la première fois dans l'Histoire on peut entendre la voix de tous" R écemment j'ai écrit sur ce blog un artik' où j'exprime mon aversion pour le livre numérique ( Tout bien réfléchi, je dis " A bas le livre numérique " !) . Alors que d'habitude,...
R oberto Bolano n'a pas jugé utile de transmettre à un éditeur ce manuscrit écrit en 1989, paru après sa mort : "Le troisième Reich" , et en sachant cela, après avoir lu ce livre, on reste abasourdi de de son exigence littéraire. Avec un tel roman, peut-être...
" Enée aiguisa Mars en son coeur"... ... Jamais on ne se lassera du génie antique. En tout cas on ne devrait pas. Une telle petite phrase, issue de " l'Eneïde" de Virgile recèle tant d'intelligence, en ce qu'elle démontre, justement, la capacité de la...
C 'est un livre d'ethnologie "savante" dans les règles de l'art et c'est néanmoins le meilleur roman que j'ai lu (d'une traite) depuis un bon moment, rédigé avec talent et clarté (ce qui montre que la rigueur en sciences sociales ne passe pas forcément...
" C hansons ! Chansons que tout cela"... Inepte réflexion, car la chanson n'est certainement pas superflue, mais essentielle aux êtres parlants que nous sommes.... Dans son essai sympathique et teinté de nostalgie, où viennent s'intercaler des récits...
T homas Munzer, le leader de la première grande révolte explicitement communiste, au seizième siècle, a été oublié dans le panthéon révolutionnaire. Ainsi cet été j'ai vu des tatouages et une serviette du bain figurant le portrait du Che, mais pas trace...
"Trouble dans le genre" (le féminisme et la subversion de l'identité) de Judith Butler est considéré comme un ouvrage clé dans l'histoire du féminisme. Comme je m'y intéresse particulièrement depuis quelques temps, s'agissant d'un enjeu de libération...
Q uand Rainer Maria Rilke écrit ses "Lettres à un jeune poète" : jeune officier qui lui soumet ses poèmes d'amateur, il lui répond pour lui seul. Et pourtant on croirait à une correspondance avec le monde entier, à une fausse correspondance destinée à...
U n récent article de Francis Fukuyama, celui qui théorisa -belle sottise- la fin de l'Histoire après la Chute du Mur de Berlin, a attiré l'attention sur l'anxiété des classes moyennes, sur leur impatience, de par le monde. Elles sont la force active...
Que voila un livre passionnant ! Voila un livre singulier, une plongée dans la vie contemporaine. Un vrai parcours. Un cadeau au lecteur sédentaire (que je suis). Je pense à John Reed en russie et dans le mexique insurgé. Même si Reed était clairement...
O n peut distinguer me semble t-il deux types d'universalistes. Les premiers sont les impériaux déguisés, bien connus (la caricature est en France Bernard Henri Levy, sorte d'idéal type de cette posture), toujours prompts à tout simplifier, à jeter des...
Paul Valéry goûte les paradoxes. Dont celui d'expliquer souvent qu'une des caractéristiques de la modernité, c'est l'imprévu, alors qu'il ose lui-même prévoir, jouer à l'oracle. Avec grand succès. " Regards sur le monde actuel et autres essais" regroupe...
J e suis sensible au glamour. Longtemps je ne l'ai point été, y voyant sans doute un symptôme narcissique de l'ère bourgeoise, mais je pense que c'est la Soul, le Jazz, plus largement le grand souffle de la culture américaine, qui m'y ont ouvert. Les...
N otre pays recèle des tas de "bizzareries" selon Emmanuel Todd et Hervé le Bras. Comment ce pays, qui apparaît le chantre (en tout cas jusqu'à récemment) d'une certaine résistance au néolibéralisme, qui a par exemple voté massivement non au traité européen...
J ean -Claude Michéa est un écrivain prolifique de courts essais incisifs essayant de secouer la gauche, sur une base qu'il veut "orwelienne", très à l'écoute du peuple et de sa "décence commune" comme la qualifiait le Maître anglais. Nous avons déjà...
L orsque la fin de la vie approcha, André Gorz décida d'écrire une lettre d'amour à sa femme. La réaffirmation de cet amour, mais aussi un bilan. Je sais que je dis là quelque chose de choquant, sans doute, mais j'ai eu l'occasion par mon parcours professionnel...
Un sociologue me classerait dans la catégorie quantitative des « grands lecteurs » (ce qui ne signifie pas que je lis bien…).
D’abord, tout petit, j’ai contemplé les livres de mes parents qui se sont rencontrés en mai 68 à Toulouse. Pas mal de brûlots des éditions Maspero et autres du même acabit… Je les tripotais, saisissant sans doute qu’ils recelaient des choses considérables.
Plus tard, vint la folie des BD : de Gotlib à Marvel.
Et puis l’adolescence… pendant cette période, mes hormones me forcèrent à oublier la lecture, en dehors des magazines d’actualité, de l'Equipe et de Rock’n Folk.
Mais la critique musicale est heureusement lieu de refuge de l’exigence littéraire. Et il arrive souvent aux commentateurs sportifs de se lâcher.
De temps en temps, je feuilletais encore les ouvrages de la bibliothèque familiale A quatorze ans, je n’avais aucune culture littéraire classique, mais je savais expliquer les théories de Charles Fourier, de Proudhon, et je savais qui étaient les « Tupamaros ».
J’étais en Seconde quand le premier déclic survint : la lecture du Grand Meaulnes. Je garde le sentiment d’avoir goûté à la puissance onirique de la littérature. Et le désir d’y retoucher ne m’a jamais quitté.
Puis je fus reçu dans une hypokhâgne de province. La principale tâche était de lire, à foison. Et depuis lors, je n’ai plus vécu sans avoir un livre ouvert. Quand je finis un livre le soir, je le range, et lis une page du suivant avant de me coucher. Pour ne pas interrompre le fil de cette "vie parallèle" qui s’offre à moi.
Lire, c’est la liberté. Pas seulement celle que procure l’esprit critique nourri par la lecture, qui à tout moment peut vous délivrer d’un préjugé. Mais aussi et peut-être surtout l’impression délicieuse de se libérer d’une gangue. J’imagine que l’Opium doit procurer un ressenti du même ordre. Lire permet de converser avec les morts, avec n’importe qui, de se glisser dans toutes les peaux et d’être la petite souris qu’on rêve…
Adolescent, j’ai souvent songé que je volais, par exemple pour aller rejoindre une copine laissée au port… Et la lecture permet, quelque peu, de s’affranchir du temps, de l’espace, des échecs , des renoncements et des oublis, des frontières matérielles ou sociales, et même de la Morale.
Je n’emprunte pas. J’achète et conserve les livres, même ceux que je ne lis pas jusqu’au bout ou qui me tombent des mains. Ma bibliothèque personnelle, c’est une autre mémoire que celle stockée dans mon cerveau. Comme la mémoire intime, elle vous manque parfois, et on ne saurait alors dire un mot sur un livre qu’on passa trois semaines à parcourir. Mais on peut à tout moment rouvrir un livre, comme on peut retrouver sans coup férir un souvenir enfoui dans la trappe de l’inconscient.
Lire est à l’individu ce que la Recherche Fondamentale est au capitalisme : une dépense inutile à court terme, sans portée mesurable, mais décisive pour aller de l’avant. Lire un livre, c’est long, et c’est du temps volé à l’agenda économique et social qui structure nos vies.
Mais quand chacun de nous lit, c’est comme s’il ramenait du combustible de la mine, pour éclairer la ville. Toute la collectivité en profite, car ses citoyens en sont meilleurs, plus avisés, plus au fait de ce qui a été dit, expérimenté, par les générations humaines. Le combat pour l’émancipation a toujours eu partie liée avec les livres. Je parie qu’il en sera ainsi à l’avenir.
J’ai été saisi par l'envie de parler de ces vies parallèles. De partager quelques impressions de lecture, de suggérer des chemins parmi tant d’autres, dans les espaces inépuisables de l’écrit. Comme un simple lecteur. Mais toujours avide.
Je vous parlerai donc des livres que je lis. Parlez-moi des vôtres.
Jérôme Bonnemaison,
Toulouse.