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27 mars 2011 7 27 /03 /mars /2011 09:07

 

  grizzly.jpg Ces jours ci, on reçoit le monde en pleine figure. Sans cesse. Comme hypnotisés par l'horreur inconcevable venue du Japon et de Lybie. Il en est ainsi dans notre village planétaire.

 

La solitude, le retrait du monde, la "déconnexion" - ce n'est pas un hasard - sont revenus comme des thèmes importants du cinéma ("Into the Wild" de Sean Penn par exemple) mais aussi de la littérature : "la route" de Mc Carthy, plus récemment "Les chaussures italiennes" d'Henning Mankell. La retraite dans les recoins du monde, toutes lucarnes bouchées, constitue t-elle la dernière étrangeté ? Et une tentation. Robinson est de retour.

 

"Sukkwan Island" de David Vann est l'histoire d'un homme et de son fils de treize ans, qui décident, à la demande du père, d'aller vivre  quelque temps dans une île perdue de l'Alaska, sans âme qui vive. Un milieu isolé, hostile, dangereux, franchement "roots"... On comprend vite que le père, Jim, manifestement très dépressif, essaie de rebondir après des échecs successifs, en se rapprochant d'un fils qu'il connaît mal.

 

Une trame toute simple, servie par une écriture très sobre mais précise, "manuelle" même (car il faut être sacrément débrouillard de ses mains pour survivre dans cette île. Moi, je tiens pas une semaine. Je laisse le sac de nourritures ouvert et je finis dévoré par un ours).

 

Dès le début on pressent que "ça va mal finir". Mais on ne sait pas comment (comme dans "le projet Blair Witch"...) et l'angoisse s'installe, efficace. Le pressentiment se vérifiera, mais ce récit nous saisira avec un art du contrepied inédit, digne de Maradona... "Sukkwan Island" est tout simplement déroutant.

 

En nous transportant en Alaska face à la nature, là où nous pouvons nous dépouiller de l'anecdotique, David Vann nous confronte, en héritier légitime de Cormac Mac Carthy, à des questions essentielles : la nature ambigue de la filiation/paternité, le mystère du suicide et du passage à l'acte, la vulnérabilité de l'être humain face à la culpabilité, la dureté de la vie qui affleure sous les fins oripeaux de la civlisation.

 

L'Alaska, c'est l'insondable en nous.

 

Tout cela avec une maîtrise et un dépouillement qui laissent pantois quand on pense qu'il s'agit du premier roman de David Vann , jeune auteur américain qui a reçu le Médicis du roman étranger pour cette oeuvre marquante.

 

Un grand auteur est peut-être apparu.

A ne pas manquer mes amis !


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commentaires

F
<br /> Bonjour,<br /> <br /> Vous êtes cordialement invité à visiter mon blog.<br /> <br /> Description : Mon Blog(fermaton.over-blog.com), présente le développement mathématique de la conscience humaine.<br /> <br /> La Page No-25, THÉORÈME DE L'ÂME<br /> <br /> LES MATHÉMATIQUES DE L'ÂME HUMAINE !<br /> <br /> Cordialement<br /> <br /> Clovis Simard<br /> <br /> <br />
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J
<br /> <br /> Et bien... Tout un programme<br /> <br /> <br /> Les maths c'est pas mon fort, mais je vais regarder.<br /> <br /> <br /> <br />

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Lectures de Jérôme Bonnemaison

 

Un sociologue me classerait dans la catégorie quantitative des « grands lecteurs » (ce qui ne signifie pas que je lis bien…).


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D’abord, tout petit, j’ai contemplé les livres de mes parents qui se sont rencontrés en mai 68 à Toulouse. Pas mal de brûlots des éditions Maspero et autres du même acabit… Je les tripotais, saisissant sans doute qu’ils recelaient des choses considérables.

 

Plus tard, vint la folie des BD : de Gotlib à Marvel.


Et puis l’adolescence… pendant cette période, mes hormones me forcèrent à oublier la lecture, en dehors des magazines d’actualité, de l'Equipe et de Rock’n Folk. Mais la critique musicale est heureusement lieu de refuge de l’exigence littéraire. Et il arrive souvent aux commentateurs sportifs de se lâcher.


 

De temps en temps, je feuilletais encore les ouvrages de la  bibliothèque familiale A quatorze ans, je n’avais aucune culture littéraire classique, mais je savais expliquer les théories de Charles Fourier, de Proudhon, et je savais qui étaient les « Tupamaros ».


 

J’étais en Seconde quand le premier déclic survint : la lecture du Grand Meaulnes. Je garde  le sentiment d’avoir goûté à la puissance onirique de la littérature. Et le désir d’y retoucher ne m’a jamais quitté.


 

Puis je fus reçu dans une hypokhâgne de province. La principale tâche était de lire, à foison. Et depuis lors, je n’ai plus vécu sans avoir un livre ouvert. Quand je finis un livre le soir, je le range, et lis une page du suivant avant de me coucher. Pour ne pas interrompre le fil de cette "vie parallèle" qui s’offre à moi.

 

 

Lire, c’est la liberté. Pas seulement celle que procure l’esprit critique nourri par la lecture, qui à tout moment peut vous délivrer d’un préjugé. Mais aussi et peut-être surtout l’impression délicieuse de se libérer d’une gangue. J’imagine que l’Opium doit procurer un ressenti du même ordre. Lire permet de converser avec les morts, avec n’importe qui, de se glisser dans toutes les peaux et d’être la petite souris qu’on rêve…


 

Adolescent, j’ai souvent songé que je volais, par exemple pour aller rejoindre une copine laissée au port… Et la lecture permet, quelque peu, de s’affranchir du temps, de l’espace, des échecs , des renoncements et des oublis, des frontières matérielles ou sociales, et même de la Morale.

 

 

Je n’emprunte pas. J’achète et conserve les livres, même ceux que je ne lis pas jusqu’au bout ou qui me tombent des mains. Ma bibliothèque personnelle, c’est une autre mémoire que celle stockée dans mon cerveau. Comme la mémoire intime, elle vous manque parfois, et on ne saurait alors dire un mot sur un livre qu’on passa trois semaines à parcourir. Mais on peut à tout moment rouvrir un livre, comme on peut retrouver sans coup férir un souvenir enfoui dans la trappe de l’inconscient.


 

Lire est à l’individu ce que la Recherche Fondamentale est au capitalisme : une dépense inutile à court terme, sans portée mesurable, mais décisive pour aller de l’avant. Lire un livre, c’est long, et c’est du temps volé à l’agenda économique et social qui structure nos vies.  


 

Mais quand chacun de nous lit, c’est comme s’il ramenait du combustible de la mine, pour éclairer la ville. Toute la collectivité en profite, car ses citoyens en sont meilleurs, plus avisés, plus au fait de ce qui a été dit, expérimenté, par les générations humaines. Le combat pour l’émancipation a toujours eu partie liée avec les livres. Je parie qu’il en sera ainsi à l’avenir.


 

J’ai été saisi par l'envie de parler de ces vies parallèles. De partager quelques impressions de lecture, de suggérer des chemins parmi tant d’autres, dans les espaces inépuisables de l’écrit. Comme un simple lecteur. Mais toujours avide.


 

Je vous parlerai donc des livres que je lis. Parlez-moi des vôtres.

 

 

Jérôme Bonnemaison,

Toulouse.

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