Mes mille et une nuits à lire
Blog d'un lecteur assidu
Adorno et Horkeimer, fondateurs de l'Ecole philosophique de Francfort, ont été biberonnés à Marx, mais aussi à Hegel et à Freud. Ils sont d'une génération qui constate la défaite de la révolution socialiste pendant la première moitié du XXème siècle,...
(Dans la première partie de l'article - publiée sur le blog - nous avons que les découvertes archéologiques, l'effort d'analyse des textes extra canoniques trouvés il y a quelques décennies, avaient contribué à renouveler le regard d'Historien sur Jésus....
"La pesanteur et la grâce" de Simone Weil est un livre mystique. Christique, car l'on ne saurait dire chrétien à l'égard de cette libertaire foncière, dégoûtée par toute forme d'institutionnalisation. On dit que des papes la lisaient en cachette. C'était...
La mort. Georges Bataille la fréquenta très jeune, lui l'enfant d'un père aveugle et paralytique. Et de deux parents sombrant dans la folie. Elève paresseux et étrange (il s'auto mutile), il a dix sept ans, en 1914, et il découvre que sa vocation est...
"Mon temps le plus chrétien, c'est auprès de toi que je l'ai vécu" Colette Peignot, à Georges Bataille. Ce n'est pas un roman de Sade, mais une vraie vie, que raconte Elizabeth Barillé, dans un récit très bien équilibré et fluide, psychologiquement percutant,...
"C'est quand on est surpris qu'il faut surprendre l'ennemi lui-même" Sun Zu, L'art de la guerre. Christophe Bourseiller, ce drôle d'individu, d'abord acteur, est devenu un spécialiste reconnu des phénomènes minoritaires, au fur et à mesure des publications,...
Il est bien difficile d'imaginer écrire une biographie d'un homme qui a surtout consacré sa vie à penser et à écrire, en dehors de ses incursions secrètes dans les délices de la chair. On pense et on écrit d'abord seul. Dans un bureau, sur un canapé ou...
" All connected" Lester, flic de baltimore, the wire " The Wire" (sur écoute) est à ce jour ma série préférée. Et pourtant des séries de grand souffle il y en a. Je ne suis pas le seul fasciné par cet objet artistique sans comparaison, qui a pour particularité...
La phrase "tout est politique" est mal comprise. Tout a une part de politique, sans doute, tout nous relie, mais tout n'est pas réductible à la politique, tout ne doit pas relever de l'affrontement politique, du volontarisme des pouvoirs, de la manipulation...
« Celui qui cherche dans mes yeux autre chose qu'une interrogation perpétuelle devra perdre la vue ; ni reconnaissance ni haine » . Les œuvres de Fanon sont nerveuses, électriques. La révolte jaillit dans une prose pressée, dense, ballottée ; trop parfois,...
Marguerite Duras est de ces rares écrivains qui suscitent un culte, dessinent une tribu relâchée, invisible mais réelle. Pour le relever il suffira de regarder les communautés littéraires existantes sur les réseaux sociaux. Sa biographie a ainsi été disséquée,...
Il est acquis de nos jours de considérer que la transparence est la vérité de l'amour et que la sincérité en serait la caution. Il en serait de l'amour comme de la démocratie libérale, en somme. Un amoureux serait ainsi, un "partenaire". Un bon citoyen....
A vant de partir en Crète, terre où Thésée terrassa le Minotaure, j'assouplis mon esprit à la pensée de midi en lisant Ovide, dont je vous parlerai bientôt, et .. Albert Camus , dont son splendide "Noces, suivi de l'été", réunion de textes épars écrits...
On parle beaucoup de Roland Barthes en ce moment. On l’expose, on le biographie. Le structuralisme ; voué aux gémonies par la vulgarité de la « nouvelle philosophie », avatar intellectuel médiocre de la réaction néo conservatrice, sortirait donc des limbes...
Certains philosophes ne peuvent pas être aisément abordés par la face nord. Comme l'himalaya. Alors il convient de lire sur eux avant de les lire. De préparer la rencontre. C'est le cas de Spinoza, c'est le cas de Nietzsche, sans doute. Deux penseurs...
" Le fait de pouvoir élire librement des maîtres ne supprime ni les maîtres ni les esclaves". Herbert Marcuse Chemin faisant en ce moment dans l'œuvre de Pasolini, cinématographique et littéraire, j'ai pensé qu'il s'inscrivait dans une nébuleuse de Cassandre...
Il s'agit d'un long essai écrit en 1991, qui a marqué, dit-on, la pensée de ce qu'on qualifie de "post modernité" : notre temps. Il est écrit par un marxiste américain, et réédité aux très sélectives éditions des beaux Arts de Paris. Je ne le conseillerai...
Quelle est la différence entre une poésie et une chanson ? Et bien, une chanson est faite pour être jouée, et une poésie pour être lue. Simplement. Mais on peut lire tous les textes de chanson. Alors ? Zaz n'est pas de la poésie. On le sent, on le sait....
J'ai découvert l'existence d'Aristides de sousa mendes dans l'essai, chroniqué dans ce blog,de Jean François Bayard, où il se demande s'il eut été résistant ou bourreau et s'interroge sur ce qui peut créer des être infiniment justes et courageux. Bien...
C hristopher Lasch, grand psycho sociologue, lie l’expansion déconcertante des névroses narcissiques au néo libéralisme (voir son essai dans ce blog sur la culture du narcissisme). A raison. Mais sans doute notre ami manque-t-il de profondeur de champ,...
L a France a affronté un traumatisme terroriste récemment. Et on a vu l’utilisation, classique, non questionnée (quel enfer de ne plus questionner les mots. C’est notre enfer. Celui du cliché vide. De la novlangue qui éradique toute capacité critique),...
O n sait Michel Tournier grand philosophe, grand psychologue. Grand romancier. C'est à dire tout cela, et le style pour le servir. Pourquoi revenir encore une fois à un récit de ce duo de prime abord inexpliquable entre Jeanne d'Arc et Gilles de Rais...
" Mes mille et une nuits à lire" vit ses derniers feux, et va progressivement s'éteindre pour renaître dans un projet culturel plus large. Un blog culturel tous azimuts. Plus personnel sans doute aussi, plus libre et foisonnant. J'y publierai tout d'abord...
J e suis retombé sur le premier Faust de Goethe en farfouillant dans les restes de ma bibliothèque de jeunesse, au domicile parental. J'avais envie de m'y replonger, comme si toute l'époque me le réclamait. Je ne savais pas pourquoi, je l'ai su après,...
Qui nous dira que la poésie est affaire de satin, coussinets et sainte nitoucherie ? Se croit-on particulièrement endurci quand on parle de "poésie urbaine" parce qu'on prend un accent macho et qu'on a un battle dress ? Plaisanteries. La poésie c'est...
Un sociologue me classerait dans la catégorie quantitative des « grands lecteurs » (ce qui ne signifie pas que je lis bien…).
D’abord, tout petit, j’ai contemplé les livres de mes parents qui se sont rencontrés en mai 68 à Toulouse. Pas mal de brûlots des éditions Maspero et autres du même acabit… Je les tripotais, saisissant sans doute qu’ils recelaient des choses considérables.
Plus tard, vint la folie des BD : de Gotlib à Marvel.
Et puis l’adolescence… pendant cette période, mes hormones me forcèrent à oublier la lecture, en dehors des magazines d’actualité, de l'Equipe et de Rock’n Folk.
Mais la critique musicale est heureusement lieu de refuge de l’exigence littéraire. Et il arrive souvent aux commentateurs sportifs de se lâcher.
De temps en temps, je feuilletais encore les ouvrages de la bibliothèque familiale A quatorze ans, je n’avais aucune culture littéraire classique, mais je savais expliquer les théories de Charles Fourier, de Proudhon, et je savais qui étaient les « Tupamaros ».
J’étais en Seconde quand le premier déclic survint : la lecture du Grand Meaulnes. Je garde le sentiment d’avoir goûté à la puissance onirique de la littérature. Et le désir d’y retoucher ne m’a jamais quitté.
Puis je fus reçu dans une hypokhâgne de province. La principale tâche était de lire, à foison. Et depuis lors, je n’ai plus vécu sans avoir un livre ouvert. Quand je finis un livre le soir, je le range, et lis une page du suivant avant de me coucher. Pour ne pas interrompre le fil de cette "vie parallèle" qui s’offre à moi.
Lire, c’est la liberté. Pas seulement celle que procure l’esprit critique nourri par la lecture, qui à tout moment peut vous délivrer d’un préjugé. Mais aussi et peut-être surtout l’impression délicieuse de se libérer d’une gangue. J’imagine que l’Opium doit procurer un ressenti du même ordre. Lire permet de converser avec les morts, avec n’importe qui, de se glisser dans toutes les peaux et d’être la petite souris qu’on rêve…
Adolescent, j’ai souvent songé que je volais, par exemple pour aller rejoindre une copine laissée au port… Et la lecture permet, quelque peu, de s’affranchir du temps, de l’espace, des échecs , des renoncements et des oublis, des frontières matérielles ou sociales, et même de la Morale.
Je n’emprunte pas. J’achète et conserve les livres, même ceux que je ne lis pas jusqu’au bout ou qui me tombent des mains. Ma bibliothèque personnelle, c’est une autre mémoire que celle stockée dans mon cerveau. Comme la mémoire intime, elle vous manque parfois, et on ne saurait alors dire un mot sur un livre qu’on passa trois semaines à parcourir. Mais on peut à tout moment rouvrir un livre, comme on peut retrouver sans coup férir un souvenir enfoui dans la trappe de l’inconscient.
Lire est à l’individu ce que la Recherche Fondamentale est au capitalisme : une dépense inutile à court terme, sans portée mesurable, mais décisive pour aller de l’avant. Lire un livre, c’est long, et c’est du temps volé à l’agenda économique et social qui structure nos vies.
Mais quand chacun de nous lit, c’est comme s’il ramenait du combustible de la mine, pour éclairer la ville. Toute la collectivité en profite, car ses citoyens en sont meilleurs, plus avisés, plus au fait de ce qui a été dit, expérimenté, par les générations humaines. Le combat pour l’émancipation a toujours eu partie liée avec les livres. Je parie qu’il en sera ainsi à l’avenir.
J’ai été saisi par l'envie de parler de ces vies parallèles. De partager quelques impressions de lecture, de suggérer des chemins parmi tant d’autres, dans les espaces inépuisables de l’écrit. Comme un simple lecteur. Mais toujours avide.
Je vous parlerai donc des livres que je lis. Parlez-moi des vôtres.
Jérôme Bonnemaison,
Toulouse.