Mes mille et une nuits à lire
Blog d'un lecteur assidu
Pour tous ceux qui s'intéressent à la révolution française, "les nuits révolutionnaires" de restif de la bretonne est un angle très particulier sur les événements, qu'il est utile de consulter. Etonnant écrivain, très prolixe et oublié, restif est un...
Dans l'épopée de la marchandisation du monde, l'humain est notre far west actuel. L'un des champs de bataille de cette soumission est la procréation médicalement assistée, et ses perspectives multiples, révolutionnaires, à en donner le vertige. Un basculement...
Si l'anthropologue Eduardo Kohn, qui signe ce livre profond, doté d'un titre qui n'a rien de métaphorique, « Comment pensent les forêts » , a vu la trilogie du « Seigneur des anneaux », il a du afficher le large sourire du sentiment analogique. En effet,...
Le moins que l'on puisse dire, c'est que notre monde va avoir besoin de diplomatie s'il veut se sortir de ses ornières. Je me souviens de ce personnage d'avocat revenu de tout, dans "Le colonel Chabert" de Balzac, qui dit à peu près "transiger, transiger,...
On m'a vu dans le Vercors Sauter à l'élastique Voleur d'amphores Au fond des criques J'ai fait la cour à des murènes J'ai fait l'amour, j'ai fait le mort T'étais pas née À la station balnéaire Tu t'es pas fait prier J'étais gant de crin, geyser Pour un...
Il ne sert à rien de critiquer négativement les livres qu'on lit. Il y a tellement de bons livres à défendre. Je passe, la plupart du temps. Mais voila, parfois, la critique négative apporte, en contraste, certaines réflexions utiles. Et puis, certains...
C'est en farfouillant dans le rayon "hispanique" d'un libraire que je suis tombé sur un essai littéraire écrit par un de mes écrivains contemporains préférés, où il théorise le type de roman qu'il affectionne (ce type de bonne surprise est un des meilleurs...
Il y a le club très sélect des livres qui sont source unique de communautés durables. La Bible, le Coran, l’Épopée de Gilgamesh.... Même le Manifeste du Parti Communiste ne peut pas y prétendre, une partie de la première Internationale ne s'y référant...
Nos gloires des Lumières, ce sont Voltaire et Rousseau. Diderot, lui, vient derrière dans la s ymbolique des géants. C’est injuste. Il a fallu un Goethe, un Nietzsche pour saluer le génie de Diderot , contributeur français à la grande tradition philosophique...
L a science fiction est un genre puissamment politique. Nous en avons la confirmation avec "World War Z" de Max Brooks (le fils de Mel.. Ambiance au repas de famille...). Elle joue le rôle du laboratoire manquant dans les sciences sociales. En soumettant...
I l est étrange et plaisant de lire un ouvrage éclos dans un autre paradigme que celui qui encadre globalement notre époque. Le paradigmes des paradigmes, l'"episteme" selon Foucault. On y goûte ce détonnant mélange d'antipode et de voisinage, puisque...
On lit pourtant. De ces lectures dévastatrices. Pourquoi ? Je ne saurais le dire. Par souci moral, de prendre une part du fardeau en s'"informant" ? Par voyeurisme ? Par propension à considérer que rien de ce qui est humain n'est étranger ? Par masochisme...
Les années 80 ont été mon socle, ma référence. Après une année passe vite. Après on vieillit, on cesse de grandir. A ce titre, avec la mort de David Bowie un peu de moi s'évapore aussi. L'homme aux mille visages était aussi un auteur, et c'est de cela...
Giordano Bruno, alchimiste, philosophe prolixe, génial précurseur, européen cosmopolite et interlocuteur des souverains, est un des personnages les plus fascinants de la Renaissance. Celui qui, pas plus que des centaines de milliers de réprimés n'a été...
Ce livre pourrait bien devenir un classique de la théorie littéraire. Il s’attache, non pas à envisager la littérature comme entité close, mais comme partage et comme transmission. Il s’agit bien de théorie littéraire et non de vade-mecum pour bibliothécaires,...
Comment agir pour la cause de la lecture , pour celle du livre (deux notions différentes qui se recoupent), à part en tenant un blog, en étant journaliste culturel, en ouvrant une librairie, tenant une maison d’éditions ou bien en enseignant le français...
C'est un roman français qui essaie d'actualiser le romantique au temps du numérique. Fabian Deldingé, écrivain qui se dit lui-même raté sur sa quatrième de couverture, s'auto édite et s'auto critique, se p réface et se post face, fort de "voir le verre...
C'est une curiosité que ce libellé chafouin anti français, signé d'un certain "M.A.S" , paru il y a trente cinq ans dans le monde hispanophone et qui a attendu que la france soit à l'apogée de sa dépression nationale pour être traduit ici. Nous sommes...
Je suis embêté, un peu. J'ai une sympathie non négociable pour Edouard Louis. Je suis comme lui un transfuge social - moins radical, certes, dans la distance f r anchie -, je connais comme lui la littérature et la sociologie des transfuges, j'ai lu Eribon,...
"Le visage aspergé d’un produit antiseptique vert, Ludmila Oulitskaïa est restée stoïque. « Dieu merci, ce n’était pas de l’acide sulfurique. » La romancière russe, dont les œuvres ont été traduites dans le monde entier, a été victime, jeudi 28 avril,...
L'oeuvre d'Annie Ernaux rend justice. Mais elle n'y est pas réductible loin s'en faut. C'est une écriture de consolidation, ce me semble, qui vise à unifier ce que la t rajectoire sociale pourrait morceler jusqu'à la souffrance intenable . A reconstituer...
" Meursault, contre-enquête" de Kamel Daoud a fait parler de lui - dans la mesure où un livre le peut encore-. Tant mieux si ce petit tumulte, vaguelette face au moindre dérapage sur un réseau social de la part d'une starlette, aura conduit à lire ce...
« Il faut bien que ça ait un nom ! » Les éditions l’Age d’homme m’ont très élégamment proposé de puiser dans leur catalogue pour alimenter mon blog. Je l’ai fait avec plaisir, tant leur ligne éditoriale est variée et originale. J’y ai trouvé notamment...
C'est le troisième livre de Javier Ce rcas que je lis, je n'avais pas voulu commencer par son grand succès, l'opus qui l'avait fait connaître en France. "Les soldats de Salamine" est dans la veine de ce que Cercas pratique le mieux : le récit réel , mêlé...
Le récit réel est le genre littéraire contemporain par excellence. Ni autocentré, ni candide sur l’omniscience d’une voix neutre et d’une passivité du lecteur, il tire les leçons des acquis de l’Histoire littéraire . Il lie le politique et l’intime, sans...
Un sociologue me classerait dans la catégorie quantitative des « grands lecteurs » (ce qui ne signifie pas que je lis bien…).
D’abord, tout petit, j’ai contemplé les livres de mes parents qui se sont rencontrés en mai 68 à Toulouse. Pas mal de brûlots des éditions Maspero et autres du même acabit… Je les tripotais, saisissant sans doute qu’ils recelaient des choses considérables.
Plus tard, vint la folie des BD : de Gotlib à Marvel.
Et puis l’adolescence… pendant cette période, mes hormones me forcèrent à oublier la lecture, en dehors des magazines d’actualité, de l'Equipe et de Rock’n Folk.
Mais la critique musicale est heureusement lieu de refuge de l’exigence littéraire. Et il arrive souvent aux commentateurs sportifs de se lâcher.
De temps en temps, je feuilletais encore les ouvrages de la bibliothèque familiale A quatorze ans, je n’avais aucune culture littéraire classique, mais je savais expliquer les théories de Charles Fourier, de Proudhon, et je savais qui étaient les « Tupamaros ».
J’étais en Seconde quand le premier déclic survint : la lecture du Grand Meaulnes. Je garde le sentiment d’avoir goûté à la puissance onirique de la littérature. Et le désir d’y retoucher ne m’a jamais quitté.
Puis je fus reçu dans une hypokhâgne de province. La principale tâche était de lire, à foison. Et depuis lors, je n’ai plus vécu sans avoir un livre ouvert. Quand je finis un livre le soir, je le range, et lis une page du suivant avant de me coucher. Pour ne pas interrompre le fil de cette "vie parallèle" qui s’offre à moi.
Lire, c’est la liberté. Pas seulement celle que procure l’esprit critique nourri par la lecture, qui à tout moment peut vous délivrer d’un préjugé. Mais aussi et peut-être surtout l’impression délicieuse de se libérer d’une gangue. J’imagine que l’Opium doit procurer un ressenti du même ordre. Lire permet de converser avec les morts, avec n’importe qui, de se glisser dans toutes les peaux et d’être la petite souris qu’on rêve…
Adolescent, j’ai souvent songé que je volais, par exemple pour aller rejoindre une copine laissée au port… Et la lecture permet, quelque peu, de s’affranchir du temps, de l’espace, des échecs , des renoncements et des oublis, des frontières matérielles ou sociales, et même de la Morale.
Je n’emprunte pas. J’achète et conserve les livres, même ceux que je ne lis pas jusqu’au bout ou qui me tombent des mains. Ma bibliothèque personnelle, c’est une autre mémoire que celle stockée dans mon cerveau. Comme la mémoire intime, elle vous manque parfois, et on ne saurait alors dire un mot sur un livre qu’on passa trois semaines à parcourir. Mais on peut à tout moment rouvrir un livre, comme on peut retrouver sans coup férir un souvenir enfoui dans la trappe de l’inconscient.
Lire est à l’individu ce que la Recherche Fondamentale est au capitalisme : une dépense inutile à court terme, sans portée mesurable, mais décisive pour aller de l’avant. Lire un livre, c’est long, et c’est du temps volé à l’agenda économique et social qui structure nos vies.
Mais quand chacun de nous lit, c’est comme s’il ramenait du combustible de la mine, pour éclairer la ville. Toute la collectivité en profite, car ses citoyens en sont meilleurs, plus avisés, plus au fait de ce qui a été dit, expérimenté, par les générations humaines. Le combat pour l’émancipation a toujours eu partie liée avec les livres. Je parie qu’il en sera ainsi à l’avenir.
J’ai été saisi par l'envie de parler de ces vies parallèles. De partager quelques impressions de lecture, de suggérer des chemins parmi tant d’autres, dans les espaces inépuisables de l’écrit. Comme un simple lecteur. Mais toujours avide.
Je vous parlerai donc des livres que je lis. Parlez-moi des vôtres.
Jérôme Bonnemaison,
Toulouse.